LXVIII D'un discours qui ne serait pas du semblant 1970 – 1971 Leçon du 17 mars 1971
Leçon du 17 mars 1971
De ce séminaire sur la Lettre volée, donc… Je ne sais pas encore ce que ça peut donner. Est-ce qu’on m’entend, là, au quatrième rang ? Formidable !…. Au moins on respire. Ça peut permettre des rapports plus efficaces. Par exemple, dans un cas, je pourrai demander à quelqu’un de sortir. À la limite je pourrai faire une crise de nerfs, m’en aller moi-même. Enfin, dans l’autre, dans l’autre amphi, ça ressemblait un peu trop au plus grand nombre de cas où on croit qu’il existe un rapport sexuel. Parce qu’on est coincé dans une boi-boîte. Ça va me permettre de vous demander de lever le doigt ! Quels sont ceux qui, sur ma suggestion expresse, ont fait l’effort de relire les pages 31 à 40 de ce qu’on appelle mes Ecrits ? Enfin, levez le doigt quand même ! Ici, on peut lever le doigt. Il n’y en a pas tellement que ça. Je ne sais pas si je ne vais pas faire la crise de nerfs. M’en aller tout simplement, puisque en somme il faut avoir des ressources minimes pour demander à quelqu’un quel rapport il a pu éventuellement sentir de ces pages, de ces pages, à ce dont j’ai dit que j’y parlais, à savoir du phallus. Qui est-ce qui se sent d’humeur — voyez je suis gentil, je n’interpelle personne — qui est-ce qui se sent d’humeur à en dire quelque chose, voire ceci, pourquoi pas, qu’il y a guère moyen de s’en apercevoir. Est-ce que quelqu’un aurait la gentillesse de me communiquer un petit bout de réflexion qu’a pu lui inspirer je ne dis pas : ces pages, mais ce que la dernière fois j’ai dit de ce en quoi elles consistaient à mon gré. X, écoutez, vous, est-ce que vous les avez relues ces pages ? — Vous les avez pas relues ? Foutez le camp ! Bon enfin, c’est bien ennuyeux. C’est tout de même pas moi qui vais vous en faire la lecture. Ça c’est vraiment trop me demander. Mais enfin, je prends ça au hasard. Je suis un tout petit peu étonné quand même, je suis un tout petit peu étonné, de ne pas pouvoir, sauf à entrer dans l’ordre de la taquinerie, obtenir une réponse. Oui ! C’est tout de même très ennuyeux. Je ne parle très précisément dans ces pages, que de la fonction du phallus en tant qu’elle s’articule, qu’elle s’articule dans un certain discours, et ce n’était pourtant pas le temps où j’avais encore même ébauché de construire toute cette variété, cette combinaison tétraédrique, à quatre sommets, que je vous ai présentée l’année dernière, et je constate pourtant que, dès ce niveau on ne peut pas dire, dès ce niveau, dis-je, de ma construction, dès ce temps si vous voulez aussi, j’ai dirigé mon coup, si je puis dire, j’ai dirigé mon coup — c’est beaucoup dire, pouvoir tirer, c’est déjà ça, de façon telle qu’il ne me paraisse pas maintenant porter à faux. Je veux dire dans un stade plus avancé de cette construction. Bien sûr, quand j’ai dit la dernière fois, je me laisse aller comme ça, surtout quand il faut un peu faire semblant de respirer, j’ai dit la dernière fois que je m’admirai, j’espère que vous n’avez pas pris ça au pied de la lettre. Ce que j’admirais, c’était en effet plutôt le tracé que j’avais fait dans le temps où je commençais seulement à faire un certain sillon en fonction de repère, qui ne soit pas maintenant nettement à rejeter, qui ne me fasse pas honte.
C’est là-dessus que j’ai terminé l’année dernière, et c’est assez remarquable. Voire même on peut peut-être y prendre un petit quelque chose, une ébauche, comme ça, un encouragement à continuer. Qu’il soit tout à fait frappant que tout ce qui y est péchable si je puis dire, de signifiant, et là, c’est bien de ça qu’il s’agit, je suis venu à la pêche de ce séminaire sur la Lettre volée, dont je pense qu’après tout depuis un temps, le fait que je l’aie mis en tête n’est-ce pas, en dépit de toute chronologie, montrait peut-être qu’il fallait, que j’avais l’idée, que c’était en somme la meilleure façon d’introduire à mes Ecrits. Alors la remarque que je fais sur ce fameux homme who dares all things, those unbecoming as well as those becoming a man, il est bien certain que si j’insiste à ce moment-là pour dire que de ne pas le traduire littéralement « ce qui est indigne aussi bien que ce qui est digne d’un homme », montre que c’est dans son bloc que le côté indicible, honteux, qui ne se dit pas, quant à ce qui concerne un homme, est bien là pour tout dire le phallus, et que il est clair que le traduire n’est-ce pas, en le fragmentant en deux : « ce qui est digne d’un homme aussi bien que ce qui est indigne de lui », que ce que sur quoi j’insiste ici, que ce n’est pas la même chose de dire « the robber’s knowledge of the loser’s knowledge of the robber », la connaissance qu’a le voleur de la connaissance qu’a le volé de son voleur, que cet élément de savoir qui sait, à savoir d’avoir imposé un certain fantasme de soi, justement l’homme qui ose tout, est là comme tout de suite le dit Dupin, la clé de la situation. Je dis ça, je dis ça et je vais pas y revenir, car à vrai dire, ce que je vous indiquais aurait pu pour quelqu’un qui s’en serait donné la peine, permettre directement, sur un texte comme ça, d’avancer la plupart des articulations que j’aurais peut-être à développer, à dérouler, à construire aujourd’hui comme vous allez le voir, si vous voulez bien dans un second temps, après avoir entendu ce que j’aurais plus ou moins réussi à dire, se trouvait en somme déjà bel et bien écrit là, et non seulement écrit là, avec toutes et les mêmes articulations nécessaires, celles par lesquelles je crois devoir vous promener.
Donc tout ce qui est là est non seulement tamisé et lié, est bien fait de ces signifiants disponibles pour une signification plus élaborée. Celle en somme d’un enseignement — le mien — que je peux dire sans précédent, autre que Freud lui-même. Et justement en tant qu’il définit la précédente de façon telle qu’il faut en lire la structure dans ses impossibilités. Peut-on dire qu’à proprement parler, par exemple, Freud formule cette impossibilité du rapport sexuel, non pas comme telle, je le fais simplement parce que, et puis c’est tout simple à dire, c’est écrit, en long et en large. C’est écrit dans ce que Freud écrit. Il n’y a qu’à le lire. Seulement vous allez voir tout à l’heure pourquoi vous ne le lisez pas. J’essaie de le dire. De dire pourquoi moi je le lis. La lettre donc, purloined, non pas volée mais comme je l’explique, je commence par là, qui va faire un détour, ou comme je le traduis moi, la lettre en souffrance, ça commence comme ça et ça se termine, ce petit écrit, par ceci qu’elle arrive pourtant à destination. Et, si vous le lisez, j’espère qu’il y en aura un petit peu plus qui le liront d’ici que je vous revoie, ce qui ne sera pas avant une paye, parce que tout ça c’est très bien calculé, deuxième et troisième mercredi ; je les ai choisis parce que pendant le mois d’avril, ça tombe pendant les vacances de Pâques, alors, vous ne me reverrez qu’en mai. On aura le temps de lire les quarante pages de la Lettre volée. À la fin je tiens à souligner ce qui en est l’essentiel, et pourquoi la traduction « la lettre volée » n’est pas la bonne, « The purloined letter », ça veut quand même dire, ça veut dire que quand même, elle arrive à destination. Et la destination, je la donne. Je la donne comme la destination fondamentale de toute lettre, je veux dire épistole, elle arrive, disons, même pas à celui, ni à celle, à ceux qui ne peuvent rien y comprendre, dont la police, dans l’occasion. Bien entendu elle est tout à fait incapable d’y comprendre quoi que ce soit comme je le souligne et je l’explique en de nombreuses pages — justement c’est même pour ça qu’elle était même pas capable de la trouver — à ce substrat, ce matériel de la lettre. Tout ça est dit très joliment, cette invention, cette forgerie de Poe, magnifique, la lettre est bien entendu hors de la portée de l’explication de l’espace, puisque c’est de ça qu’il s’agit. C’est ça que le préfet vient dire, enfin ce que la police vient dire d’abord, c’est que tout ce qui est chez le ministre, étant donné qu’on est sûr que la lettre y est, qu’elle est là pour qu’il l’ait toujours à portée de la main, on dit pourquoi, que l’espace a été littéralement quadrillé. C’est amusant, hein ? de me livrer là, comme ça, je ne sais pas, à chaque fois que je me laisse un peu, de temps en temps, un peu aller dans les pentes, pourquoi pas, à quelques considérations, comme ça, sur l’espace. Ce fameux espace qui est bien pour notre logique depuis un bon moment, depuis Descartes, la chose la plus encombrante du monde.
C’est bien tout de même une occasion d’en parler, si tant est qu’il faille l’ajouter comme une sorte de note en marge, comme de ce que j’isole, que comme de ce que je distingue comme la dimension de l’Imaginaire. Il y a quand même des gens qui se tracassent, pas forcément sur cet écrit-là, sur d’autres, ou même aussi quelquefois qui ont gardé des notes de ce que j’ai pu dire dans un temps, par exemple sur l’identification ; c’était une année, 61-62, je dois dire que tous mes auditeurs pensaient à autre chose sauf, je sais pas, un ou deux qui venaient tout à fait du dehors, qui ne savaient pas ce qui se passait exactement. J’y ai parlé du trait unaire alors on se tracasse maintenant, il semble que ce soit légitime, à savoir, ce trait unaire, où est-ce qu’il faut le mettre. Du côté du Symbolique, ou de l’Imaginaire ? Et pourquoi pas du Réel ? Quoiqu’il en soit tel que, puisque c’est comme ça que ça se passe, un bâton, ein einziger Zug, car c’est bien sûr dans Freud que j’ai été le pécher, qui pose quelques questions, comme je vous l’ai déjà un peu introduit la dernière fois, par cette remarque qu’il était tout à fait impossible de penser quoi que ce soit qui tienne debout sur cette bipartition si difficile, si problématique, pour les mathématiciens, qui est à savoir, est-ce que tout peut être réductible à la logique pure, c’est-à-dire à un discours qui se soutient d’une structure bien déterminée. Est-ce qu’il n’y a pas un élément absolument essentiel qui reste, quoi que nous fassions pour l’enserrer de cette structure, le réduire, qui tout de même reste un dernier noyau et qu’on appelle intuition. Assurément, c’est la question dont Descartes est parti, je veux dire, je vous ferai remarquer, c’est que le raisonnement mathématique, à son gré, ne tirait rien d’efficace, de créateur, de quoi que ce fût qui fut de l’ordre du raisonnement, mais seulement son départ, à savoir une intuition originale et qui est celle qu’il pose, institue de sa distinction originelle de l’étendue et de la pensée. Bien sûr, cette opposition cartésienne, d’être faite plus par un penseur que par un mathématicien — non pas certes incapable de produire en mathématiques, comme les effets s’en sont prouvés — a été bien sûr bien plus enrichie par les mathématiciens eux-mêmes, c’est bien la première fois que quelque chose venait aux mathématiques par la voie de la philosophie. Car je vous prierais de remarquer cette chose qui me semble à moi très certaine — qu’on me contredise si on le peut, il serait facile de trouver là-dessus plus compétent que moi — il est tout de même très frappant que les mathématiciens de l’Antiquité aient, eux, poursuivis leur marche sans avoir le moindre égard à tout ce qui pouvait se passer dans les écoles de sagesse, dans les écoles quelles qu’elles fussent de philosophie. Il n’en est pas de même de nos jours, ou assurément l’impulsion cartésienne concernant la distinction de l’intuitionner du raisonner est une chose qui a fortement travaillé la mathématique elle-même. C’est bien en cela que je ne peux pas ne pas y trouver une veine, un effet de quelque chose qui a un certain rapport avec ce qu’ici, sur le champ dont il s’agit et que je tente, et qu’il me semble que la remarque que je peux faire, du point où je suis, sur les rapports entre la parole et l’écrit, de ce qu’il y a, au moins dans cette première arête, sur ce qu’il y a de spécial dans la fonction de l’écrit au regard de tout discours, est de nature peut-être à faire que les mathématiciens s’aperçoivent de ce que j’ai indiqué la dernière fois, que l’intuition même de l’espace euclidien doit quelque chose à l’écrit. D’autre part, si comme je vais essayer de vous le pousser un peu plus loin, ce qu’on appelle en mathématique « recherche logique », réduction logique, l’opération mathématicienne, c’est quelque chose qui en tout cas ne va pas, ne saurait avoir d’autre support — il suffit pour le constater de suivre l’histoire — que la manipulation de petites ou de grandes lettres, de lots alphabétiques divers, je veux dire lettres grecques ou lettres germaniques, plusieurs lots alphabétiques, toute manipulation dont avance la réduction logistique dans le raisonnement mathématique nécessite ce support.
Comme je vous le répète, je ne vois pas la différence essentielle avec ce qui était, longtemps, pendant toute une époque, XVIIe, XVIIIe siècles, la difficulté de la pensée mathématicienne, à savoir, la nécessité du tracé, pour la démonstration euclidienne, qu’au moins un de ces triangles soit là tracé. À partir de quoi chacun s’affole, ce triangle qui aura été tracé, est-ce le triangle général, ou un triangle particulier ? Car il est bien clair qu’il est toujours particulier, et que ce que vous démontrez pour le triangle en général, à savoir, toujours la même histoire, à savoir que les trois angles qui font deux droits, ben il est clair qu’il faut pas que vous disiez que ce triangle n’a pas le droit d’être aussi bien rectangle isocèle à la fois ou équilatéral. Donc il est toujours particulier. Ça a énormément tracassé les mathématiciens. Je passe bien sûr, ce n’est pas l’endroit de le rappeler ici, on est pas là pour faire de l’érudition, à travers quel et quel ça coule depuis Descartes, Leibnitz ou d’autres, ça va jusqu’à Husserl, ils me semblent n’avoir jamais vu cet os tout de même, que l’écriture est là des deux côtés, elle est bien homogénéisant l’intuitionner et le raisonner, que l’écriture en d’autres termes des petites lettres, n’a pas de fonction moins intuitive que ce que traçait le bon Euclide. Il s’agirait quand même de savoir pourquoi on pense que ça fait une différence. Je ne sais pas si je dois vous faire remarquer que la consistance de l’espace, de l’espace euclidien, de l’espace qui se ferme sur ses trois dimensions, me semble devoir être définie d’une bien autre façon. Si vous prenez deux points, ils sont à égale distance l’un de l’autre si je puis dire, la distance est la même du premier au second que du second au premier. Vous pouvez en prendre trois et faire que ce soit encore vrai, à savoir que chacun est à égale distance de chacun des deux autres. Vous pouvez en prendre quatre et faire que ce soit encore vrai. Je ne sais pas, je n’ai jamais entendu pointer ça expressément. Vous pouvez en prendre cinq, ne vous précipitez pas pour dire que là aussi vous pouvez les mettre à égale distance de chacun des quatre autres parce que, tout au moins dans notre espace euclidien, vous n’y arriverez pas. Il faut pour que vous ayez ces cinq points à égale distance, vous m’entendez bien, de chacun de tous les autres, que vous fabriquiez une quatrième dimension. Voilà ! Bien sûr, c’est très aisé, à la lettre, et puis ça tient très bien, on peut démontrer qu’un espace à quatre dimensions est parfaitement cohérent dans toute la mesure où on peut montrer le lien de sa cohérence à la cohérence des nombres réels. C’est dans cette mesure même qu’il se soutient. Mais enfin, c’est un fait que, au-delà du tétraèdre, déjà, l’intuition a à se supporter de la lettre. Je me suis lancé là-dedans pour vous dire, parce que j’ai dit que la lettre qui arrive à destination c’est la lettre qui arrive à la police, qui n’y comprend rien, et que la police comme vous le savez, elle n’est pas née d’hier, trois piques comme ça sur le sol, trois piques sur le campus, pour peu que vous connaissiez un petit peu ce qu’a écrit Hegel, vous saurez que c’est l’Etat. L’Etat et la police, pour quelqu’un qui a un tout petit peu réfléchi, on peut pas dire que Hegel là-dessus soit si mal placé, c’est exactement la même chose. Ça repose sur une structure tétraédrique, en d’autres termes, dès que nous mettons en question quelque chose comme la lettre, il faut que nous sortions de mes petits schémas de l’année dernière, qui étaient faits comme vous vous en souvenez comme ça : Voilà, le discours du maître, comme vous vous en souvenez peut-être, caractérisé par ceci que des six arêtes du tétraèdre, une est rompue.
C’est dans la mesure où on fait tourner ces structures sur les quatre arêtes du circuit qui dans le tétraèdre se suivent, c’est une condition, s’emmanchent dans le même sens, dans ce sens que tourne en rond une, n’importe laquelle des deux autres, des trois autres, que la variation s’établit de ce qu’il en est de la structure du discours, très précisément en tant qu’elle reste à un certain niveau de construction qui est celui, tétraédrique, celui tétraédrique, dont on ne saurait se contenter dès lors qu’on fait surgir l’instance de la lettre. C’est même parce qu’on ne saurait s’en contenter, qu’à rester à son niveau, il y a toujours un de ces côtés de ce qui fait cercle qui se rompt. Alors, c’est de là qu’il résulte que dans un monde tel qu’il est structuré par un certain tétraèdre, la lettre n’arrive à destination qu’à trouver celui que dans mon discours sur la Lettre volée, je désigne du terme du Sujet qui n’est pas du tout à éliminer d’aucune façon ni à retirer, sous prétexte que nous faisons quelques pas dans la structure, et dont il faut tout de même bien partir de ceci, c’est que si ce que nous avons découvert sous le terme d’inconscient a un sens, le Sujet, je vous le répète, irréductible, nous ne pouvons pas, même à ce niveau, ne pas en tenir compte, mais le Sujet se distingue de sa toute spéciale imbécillité. C’est ce qui compte dans le texte de Poe, du fait que celui sur lequel il badine à cette occasion, ce n’est pas pour rien que c’est le roi, qui ici se manifeste en fonction de Sujet. Il comprend absolument rien et toute sa structure policière ne fera pas néanmoins que la lettre n’arrive même pas à sa portée, étant donné que c’est la police qui la garde et qu’elle ne peut rien en faire. Je souligne même que, dût-on la retrouver dans ses dossiers, ça ne peut pas servir à l’historien. Dans telle et telle page de ce que j’écris à propos de cette lettre, on peut dire qu’il n’y a très probablement que la Reine qui sait ce qu’elle veut dire, et que tout ce qui fait son poids, c’est que, si la seule personne que ça intéresse, à savoir le Sujet, le Roi, l’avait en main, il n’y comprendrait que ceci : c’est que, elle a sûrement un sens et que c’est en ça qu’est le scandale, que c’est un sens qui à lui, le Sujet, lui échappe. Le terme de scandale, ou encore de contradiction, est à la bonne place dans ces quatre petites dernières pages que je vous avais donné à lire, je souligne. Il est clair que c’est uniquement en fonction de cette circulation de la lettre que le ministre — puisque ici il y en a eu quand même quelques-uns qui ont autrefois lu Poe, vous devez savoir qu’il y a un ministre dans le coup, celui qui a barboté la lettre — que le ministre nous montre au cours du déplacement de ladite lettre, des variations, tel le poisson courant ses variations de couleur et à la vérité que sa fonction essentielle, que tout mon texte joue un petit trop abondamment — mais on ne saurait trop insister pour se faire entendre — joue sur le fait que la lettre a un effet féminisant. Mais dès qu’il l’a plus la lettre, parce qu’il n’en sait rien lui-même, dès qu’il ne l’a plus, le voici, en quelque sorte, restitué à la dimension, justement, que tout son dessein était fait pour se donner à lui-même, celle de l’homme qui ose n’importe quoi. Et j’insiste sur ce virage de ce qui se passe, c’est ce sur quoi se termine cet énoncé poesque, c’est que c’est à ce moment-là que la chose apparaît, monstrum horrendum, comme on dit dans le texte, ce qu’il avait voulu être pour la Reine, qui bien sûr en a tenu compte, puisqu’elle a essayé de la ravoir, cette lettre, mais enfin avec lui le jeu se tenait. C’est pour notre Dupin, à savoir le malin des malins, celui auquel Poë donne le rôle, le rôle de nous jeter quelque chose que j’appellerai assez volontiers, je le souligne dans ce texte, quelque poudre aux yeux. A savoir que nous croyons que le malin des malins ça existe, à savoir que lui, vraiment, comprend, sait tout, qu’en étant dans le tétraèdre, il peut comprendre comment il est fait. J’ai assez ironisé sur ces choses certainement très habiles, qui sont le jeu de mots autour d’ambitus, de religio ou d’honesti hommes, pour montrer et dire simplement, quant à moi, que je cherchais un peu plus loin la petite bête, n’est-ce pas, et que à la vérité elle est quelque part ; elle est quelque part à suivre Poe, on peut se poser la question de savoir si Poe s’en est bien aperçu.
À savoir que le seul fait d’être passée entre les mains de Dupin, la lettre l’a féminisé à son tour, assez pour que, à l’endroit du ministre, tel qu’il sait pourtant l’avoir privé de ce qui pourrait lui permettre de continuer à jouer son rôle si jamais il faut en abattre les cartes — c’est précisément à ce moment-là que ce Dupin ne peut pas se contenir et manifeste à l’endroit de celui qui se croit déjà suffisamment avoir mis à sa merci quiconque, pour ne pas laisser plus de trace, qu’il lui envoie ce message dans le billet qu’il a substitué à la lettre dérobée, « un destin si funeste… », enfin, vous savez le texte, « s’il n’est digne d’Atrée, est digne de Thyeste ». La question, si je puis dire, est de s’apercevoir si je puis dire, si Poe dans l’occasion s’aperçoit bien de la portée de ceci, de ce que Dupin, dans cette sorte de message au-delà de toutes les possibilités, car Dieu sait si jamais ça arrivera que le ministre la sorte, sa lettre, et se trouve du même coup dégonflé, pour vous dire que la castration soit là, comme elle, suspendue, parfaitement réalisée. J’indique aussi cette perspective qui ne me paraît, enfin ! Pas écrite d’avance. Ça donne que plus de prix à ce que Dupin écrit comme message à celui qu’il vient de priver de ce qu’il croit être son pouvoir. Ce petit poulet, qu’il jubile à la pensée de ce qui se passera quand l’intéressé devant qui, à quelle fin, aura à en faire usage, ce qu’on peut dire, c’est que Dupin jouit. Alors, c’est là la question, la question que j’amorçai la dernière fois en vous disant, est-ce que c’est la même chose le narrateur et celui qui écrit ? Ce qui est incontestable, c’est que le narrateur, le sujet de l’énoncé, celui qui parle, c’est Poe. Est-ce que Poe jouit de la jouissance de Dupin, ou d’ailleurs ? C’est là ce qu’aujourd’hui je vais m’efforcer de vous montrer. Je vous parle de la Lettre volée telle que je l’ai articulée moi-même, c’est là une illustration que je peux donner à la question que j’ai posée la dernière fois. Est-ce que ce n’est pas radicalement différent celui qui écrit, et celui qui parle en son nom au titre du narrateur dans un écrit ? À ce niveau, c’est sensible. Car ce qui se passe au niveau du narrateur, c’est en fin de compte ce que je pourrais appeler, je m’excuse d’insister sur le caractère démonstratif de ce petit essai, c’est qu’à la fin du compte, c’est la plus parfaite castration qui est démontrée. Tout le monde est également cocu, et personne n’en sait rien. C’est certain, le Roi bien sûr dort depuis le début et dormira jusqu’à la fin de ses jours sur ses deux oreilles ; la Reine ne se rend pas compte qu’il est à peu près fatal qu’elle devienne folle de ce ministre, maintenant qu’elle le tient ! Qu’elle l’a châtré, hein ? C’est un amour ! Le ministre pour être fait, il est fait, mais en fin de compte ça ne lui fait ni chaud ni froid, parce que comme je l’ai très bien expliqué quelque part, de deux choses l’une : ou il lui plaît de devenir l’amant de la Reine et ça devrait être agréable, en principe, on dit ça, ça plaît pas à tout le monde, ou si vraiment il a pour elle un de ces sentiments qui sont de l’ordre de ce que j’appelle moi le seul sentiment lucide, à savoir la haine, comme je vous l’ai très bien expliqué, s’il la hait, elle l’en aimera d’autant plus, et ça lui permettra d’aller si loin, qu’il finira quand même par se douter que la lettre, elle n’est plus là depuis longtemps. Parce qu’il se trompera naturellement. Il se dira que si on va si loin avec lui, c’est qu’on est sûr des choses, alors, il ouvrira son petit papelard à temps, mais en aucun cas il ne reviendra à ce qui est la chose souhaitée, c’est que le ministre, il finisse par se ridiculiser ; il ne le sera pas ! Bon ! Eh bien voilà ! Voilà ce que j’ai réussi à dire à propos de ce que j’ai écrit, et ce que je voudrais vous dire, c’est que ça prend sa portée de ce que c’est illisible. C’est là le point, si vous voulez bien encore m’entendre, que je vais essayer de développer. Comme beaucoup de gens, je vous le dis tout de suite parce que ce sont des gens du monde, les seuls qui soient capables de me dire ce qu’ils pensent à propos de ce que je leur refile ; c’était le moment où mes Ecrits n’étaient pas encore parus, ils m’ont donné leur point de vue de techniciens, « on n’y comprend rien » qu’ils m’ont dit. Remarquez que c’est beaucoup. Quelque chose auquel on ne comprend rien, c’est tout l’espoir, c’est le signe qu’on en est affecté. Heureusement qu’on a rien compris ! Parce que on ne peut jamais comprendre que ce que bien sûr on a déjà dans la tête. Mais enfin, je voudrais essayer d’articuler ça un peu mieux. Il suffit pas d’écrire quelque chose qui soit exprès incompréhensible, mais de voir pourquoi l’illisible a un sens. Je vous ferai remarquer d’abord que… toute notre affaire qui est l’histoire du rapport sexuel, n’est-ce pas, tourne autour de ceci que vous pourriez croire que c’est écrit puisqu’en somme, c’est ce qu’on a trouvé dans la psychanalyse, on est tout de même bien référé à un écrit. L’Œdipe, c’est un mythe écrit et je dirai même plus, c’est très exactement la seule chose qui le spécifie. On aurait pu prendre exactement n’importe lequel, pourvu qu’il soit écrit. Le propre d’un mythe qui est écrit, comme l’a fait remarquer déjà Claude Lévi-Strauss, c’est que de l’écrire, il n’a qu’une seule forme, alors que le propre du mythe, comme toute l’œuvre de Lévi-strauss essaie de le démontrer, c’est d’en avoir une très très grande quantité, c’est ça qui le constitue comme mythe, un mythe écrit. Alors ce mythe écrit pourrait très bien passer pour l’inscription de ce qu’il en est du rapport sexuel. Je voudrais tout de même vous faire remarquer certaines choses. Voilà ! C’est que, c’est pour ça qu’il n’est pas indifférent que je sois parti de ce texte, c’est que si cette lettre, cette lettre en l’occasion peut avoir cette fonction, cette fonction féminisante, n’est-ce pas, c’est que par rapport à ce que je vous ai dit de ceci, que le mythe écrit, l’Œdipe est fait très exactement pour nous pointer, c’est que c’est impensable de dire : la femme.
C’est impensable, pourquoi ? Parce que on ne peut pas dire : toutes les femmes. On peut pas dire toutes les femmes parce que ce n’est introduit dans ce mythe qu’au nom de ceci que le Père possède toutes les femmes, ce qui est manifestement le signe d’une impossibilité. D’autre part, ce que je souligne à propos de cette Lettre volée, c’est que s’il n’y a qu’une femme, qu’en d’autres termes la fonction de la femme ne se déploie que de ce que le grand mathématicien Brouwer dans le contexte de ce que je vous ai énoncé, avancé tout à l’heure sur la discussion mathématique appelle la « multiunité », à savoir ceci, qu’il y a une fonction qui est à très proprement parler celle que le Père est là, le Père est là pour s’y faire reconnaître, dans sa fonction radicale, dans celle qu’il a toujours manifestée, et chaque fois qu’il s’est agi du monothéisme par exemple, ce n’est pas pour rien que Freud vient échouer là, c’est qu’il y a une fonction tout à fait essentielle qu’il convient de réserver comme étant à l’origine à très proprement parler de l’écrit. C’est ce que j’appellerai le pas plus d’un. Aristote bien sûr, fait des efforts tout à fait ravissants, considérables, comme il en fait d’habitude, pour nous rendre ça accessible par échelon, au nom de son principe qu’on peut qualifier comme ça, de principe de la remontée de l’échelle de cause en cause et d’être en être, etc., il faudra bien que vous vous arrêtiez quelque part, enfin c’est ce qu’il y a de très gentil, […] c’est qu’il parlait vraiment pour des imbéciles. D’où le développement de la fonction du sujet. C’est d’une façon tout à fait originelle que le pas plus d’un se pose. Sans pas plus d’un, vous ne pouvez même pas commencer à écrire la série des nombres entiers. Je vous montrerai ça au tableau la prochaine fois. Faut qu’il y ait un un, et puis que vous n’ayez plus ensuite qu’à la crever la bouche en rond chaque fois que vous voulez recommencer, pour qu’à chaque fois ça fasse un de plus, mais pas le même.. Par contre, tout ceux qui se répètent ainsi sont les mêmes, ils peuvent s’additionner. On appelle ça la série arithmétique. Mais revenons à ce qui nous paraît essentiel à ce sujet, concernant la jouissance sexuelle. C’est qu’il n’y a, expérience faite, une structure, quels qu’en doivent être les conditionnements particuliers, c’est que la jouissance sexuelle se trouve ne pas pouvoir être écrite, et c’est de cela que résulte la multiplicité structurale, et d’abord la tétrade dans laquelle quelque chose se dessine qui la situe, mais inséparable d’un certain nombre de fonctions qui n’ont en somme rien à faire avec ce qui peut spécifier dans le général le partenaire sexuel. La structure est telle que l’homme comme tel en tant qu’il fonctionne est châtré, et d’autre part, quelque chose existe qui est au niveau du partenaire féminin, et qu’on pourrait simplement tracer de ce trait, sur lequel je pointe la portée, toute la fonction de cette lettre en l’occasion, que la femme n’a rien à en faire, si elle existe — maintenant, c’est pour ça qu’elle n’existe pas, c’est qu’en tant que la femme, elle n’a rien à faire avec la loi. Alors, comment concevoir ce qui s’est passé ? On fait quand même l’amour, hein ? On fait quand même l’amour et on s’aperçoit à partir du moment où on s’y intéresse, depuis longtemps, et on s’y est peut-être toujours intéressé, seulement nous avons perdu la clé de la façon dont on s’y est intéressé précédemment, mais pour nous, au cœur, dans l’efflorescence de l’ère scientifique, nous apercevons ce qu’il en est par Freud. C’est quoi ? Quand il s’agit de structurer, de faire fonctionner au moyen de symboles, le rapport sexuel, qu’est-ce qui y fait obstacle ? C’est que la jouissance s’en mêle. La jouissance sexuelle est-elle traitable directement ? Elle ne l’est pas, et c’est en cela, disons, ne disons rien de plus, qu’il y a la parole. Le discours commence de ce qu’il y ait, là, béance.
On ne peut pas en rester là, je veux dire que je me refuse à toute position d’origine, et qu’après tout, rien ne nous empêche de dire que c’est parce que le discours commence que la béance se produit. C’est tout à fait indifférent pour le résultat. Ce qu’il y a de certain, c’est que le discours est impliqué dans la béance et comme il n’y a pas de métalangage, il ne saurait en sortir. La symbolisation de la jouissance sexuelle, ce qui rend évident ce que je suis en train d’en articuler, c’est qu’elle emprunte tout son symbolisme à quoi ? à ce qui ne la concerne pas, à savoir à la jouissance en tant qu’elle est interdite par certaines choses confuses, confuses mais pas tellement que ça, car nous sommes arrivés à l’articuler parfaitement, sous le nom du principe du plaisir. Ce qui ne peut avoir qu’un sens, pas trop de jouissance. Parce que l’étoffe de toutes les jouissances confinent à la souffrance, c’est même à ça que nous reconnaissons l’habit. Si la plante ne souffrait pas manifestement, nous ne saurions pas qu’elle est vivante. Il est donc clair que le fait que la jouissance sexuelle n’ait trouvé pour se structurer que la référence à l’interdit, en tant que nommé, de la jouissance, mais d’une jouissance qui n’est pas celle, qui est cette dimension de la jouissance, qui est à proprement parler la jouissance mortelle, en d’autres termes, que sa structure, la jouissance sexuelle, la prenne de l’interdit porté sur la jouissance dirigée sur le corps propre, c’est-à-dire très précisément en ce point d’arête et de frontière où elle confine à la jouissance mortelle. Et elle ne rejoint la dimension du sexuel qu’à porter l’interdit sur le corps, dont le corps propre sort, à savoir sur le corps de la mère. Ce n’est que par là que se structure, qu’est rejoint dans le discours, ce qui seul peut y apporter la loi, ce qu’il en est de la jouissance sexuelle. Le partenaire en l’occasion est bien en effet réduit à une, mais pas n’importe laquelle, celle qui t’a pondu. Et c’est autour de ça que se construit tout ce qui peut s’articuler dès que nous rentrons dans ce champ d’une façon qui soit verbalisable. Quand nous nous avancerons plus loin, je reviendrai sur la façon dont le savoir vient à fonctionner comme un jouir. Nous pouvons ici passer. La femme comme telle se trouve dans cette position uniquement rassemblée de ceci qu’elle est, je dirai, sujette à la parole. Bien sûr, je vous épargne les détours. Que la parole soit ce qui instaure une dimension de vérité, l’impossibilité de ce rapport sexuel, c’est bien aussi ce qui fait la portée de la parole en ceci bien sûr qu’elle peut tout, sauf servir au point où elle est occasionnée. La parole s’efforce de réduire la femme à la sujétion [suggestion], c’est-à-dire d’en faire quelque chose dont on attend des signes d’intelligence, si je puis m’exprimer ainsi. Mais bien sûr, ce n’est là d’aucun être réel qu’il s’agit ici, pour dire le mot, la femme en l’occasion, comme ce texte est fait pour le démontrer, la femme, je veux dire l’en-soi de la femme, la femme — comme si on pouvait dire toutes les femmes — la femme — j’insiste, qui n’existe pas — c’est justement la lettre. La lettre, en tant qu’elle est le signifiant qu’il n’y a pas d’Autre : S (A).
Et c’est là-dessus que je voudrai, avant de vous quitter, quand même vous énoncer une remarque qui dessine la configuration logique de ce que je suis en train d’avancer. Dans la logique aristotélicienne, vous avez les affirmatives, je ne les mets pas avec les lettres qui sont d’usage habituel dans la logique formelle, je ne mets pas A, j’écris universelle affirmative, et j’écris ça universelle négative, c’est ce que ça veut dire. J’écris ici particulière affirmative et particulière négative. Je fais remarquer qu’au niveau de l’articulation aristotélicienne, c’est entre ces deux pôles — puisque c’est à Aristote que ces catégories propositionnelles sont empruntées — c’est entre ces deux pôles que se fait la discrimination logique. L’universelle affirmative énonce une essence. J’ai assez souvent insisté dans le passé sur ce qu’il en est de l’énoncé tout trait est vertical et qu’il est parfaitement compatible avec ceci qu’il n’existe aucun trait, l’essence se situe essentiellement dans la logique. Elle est pur énoncé de discours. La discrimination logique, son axe essentiel dans cette articulation, est très exactement cet axe oblique que je viens ici de noter. Rien ne va contre un énoncé logique quelconque identifiable, rien, si ce n’est la remarque que : « Il y en a qui… pas », particulière négative, il y en a des traits qui ne sont pas verticaux. C’est la seule contradiction qui puisse se faire contre l’affirmation que c’est un fait d’essence. Et les deux autres termes sont, dans le fonctionnement de la logique aristotélicienne, tout à fait secondaires. À savoir, il y en a qui, affirmative particulière, et après, comment savoir si c’est nécessaire ou pas, ça ne prouve rien, et de dire « Il y en a pas qui », ce qui n’est pas la même chose que de dire : « Il y en a qui pas », c’est-à-dire l’universelle négative. Il n’y en a pas qui, ben ça prouve rien non plus. C’est un fait. Ce que je peux vous faire remarquer, c’est ce qui se passe quand, de cette logique aristotélicienne, nous passons à leur transposition dans la logique mathématique, celle qui s’est faite par la voie de ce qu’on appelle les quantificateurs. Ne m’engueulez pas parce que vous n’allez plus m’entendre, je vais d’abord écrire et justement c’est de ça qu’il s’agit. L’universelle, je disais, l’universelle affirmative va maintenant s’écrire de cette notation inverbalisable : c’est un A renversé ; je dis « A renversé », enfin, c’est pas du discours, c’est de l’écrit. Mais c’est un signal, comme vous allez le voir, pour jaspiner. x F (x), universelle affirmative, x. F (x), ici, particulière affirmative. x. F (x), ça, je veux exprimer que c’est une négative. Comment le puis-je ? Je suis frappé de ceci que ça n’a jamais été vraiment articulé comme je vais le faire. C’est qu’il faut que vous mettiez la barre de la négation au-dessus de F (x) et non pas du tout au-dessus, comme il se fait habituellement, des deux. Vous allez voir pourquoi. Et ici, c’est sur E x que vous devez mettre la barre. Je mets ici maintenant moi-même une barre équivalente à celle qui était ici, et comme celle qui était ici séparait en deux zones le groupe des quatre, ici, c’est d’une façon différente qu’elle répartit par deux. Ce que j’avance, c’est que dans cette façon d’écrire, justement, tout tient à ce qu’on peut dire à propos de l’écrit, et que la distinction en deux termes unis par un point de ce qui est ainsi écrit a cette valeur de dire qu’on peut dire de tout c’est le signal de l’A renversé — qu’il satisfait à ce qui est écrit, F (x), qu’il n’y est pas déplacé. De même, mais avec un accent différent, c’est qu’il y ait de l’inscriptible, à savoir que c’est ici que porte l’accent de l’écrit, il existe des x que vous pouvez faire fonctionner dans l’F (x), dont alors vous parlez, qu’il s’agit, dans ce qu’on appelle ici la transposition quantificatrice, au moyen des quantificateurs de la particulière. Par contre, il est si vrai que c’est autour de l’écrit que pivote le déplacement de la répartition, c’est à savoir que pour ce qui est mis au premier plan, recevable, rien n’a changé pour l’universelle, elle est toujours de prix, encore que ce ne soit pas le même prix. Par contre ce dont il s’agit ici, le clivage consiste à s’apercevoir de la non valeur de l’universelle négative, puisque là, c’est que de quelque x que vous parliez, il ne faut pas écrire F (x). Et que de même pour la particulière négative, il y a ceci, que de même qu’ici le x pouvait s’écrire, était recevable, inscriptible dans cette formule, ici simplement, ce qui est dit, c’est qu’il n’est pas inscriptible. Qu’est-ce à dire ? C’est que, ce qui de ces deux structurations est resté en quelque sorte négligé, sans valeur, à savoir l’universelle négative, l’universelle négative en tant qu’elle est celle qui permet de dire qu’il ne faut pas écrire ceci si vous parlez d’un x quelconque, en d’autres termes que c’est ici que fonctionne une coupure essentielle, eh bien ! C’est cela même autour de quoi s’articule ce qu’il en est du rapport sexuel. La question est de ce qui ne peut pas s’écrire dans la fonction F (x), à partir du moment où ceci, la fonction F (x), est elle-même à ne pas écrire, c’est-à-dire qu’elle est ce que j’ai dit tout à l’heure énoncé, ce qui est le point autour duquel va tourner ce que nous reprendrons quand je vous reverrai dans deux mois, à savoir qu’elle est à proprement parler ce qui s’appelle illisible.