samedi, juillet 27, 2024
Recherches Lacan

LIX L'IDENTIFICATION 1961 – 1962 Leçon du 17 janvier 1962

Leçon du 17 janvier 1962

 

Je ne pense pas que, pour paradoxale que puisse apparaître au premier abord la symbolisation sur laquelle j’ai terminé mon discours la dernière fois, faisant supporter le sujet par le symbole mathématique du : racine de -1, je ne pense pas que tout pour vous puisse n’être là-dedans que pure surprise.

Je veux dire qu’à se rappeler la démarche cartésienne elle-même, on ne peut oublier ce à quoi cette démarche mène son auteur. Le voilà parti d’un bon pas vers la vérité, plus encore cette vérité n’est nullement chez lui, comme chez nous, mise en la parenthèse d’une dimension qui la distingue de la réalité. Cette vérité sur quoi Descartes s’avance de son pas conquérant, c’est bien de celle de la chose qu’il s’agit. Et ceci nous mène à quoi ? À vider le monde jusqu’à n’en plus laisser que ce vide qui s’appelle l’étendue.

Comment cela est-il possible ? Vous le savez, il va choisir comme exemple, faire fondre un bloc de cire. Est-ce par hasard qu’il choisit cette matière, si ce n’est pas qu’il y est entraîné parce que c’est la matière idéale pour recevoir le sceau, la signature divine ? Pourtant, après cette opération quasi alchimique qu’il poursuit devant nous, il va la faire s’évanouir, se réduire à n’être plus que l’étendue pure ; plus rien où puisse s’imprimer ce qui justement est élidé dans sa démarche. Il n’y a plus de rapport entre le signifiant et aucune trace naturelle, si je puis m’exprimer ainsi, et très nommément la trace naturelle par excellence qui constitue l’imaginaire du corps. Ce n’est pas dire justement que cet imaginaire puisse être radicalement repoussé, mais il est séparé du jeu du signifiant. Il est ce qu’il est, effet du corps, et comme tel récusé comme témoin d’aucune vérité. Rien à en faire que d’en vivre, de cette imaginaire théorie des passions, mais ne surtout pas penser avec. L’homme pense avec un discours réduit aux évidences de ce qu’on appelle la lumière naturelle, c’est-à-dire un groupe logistique qui, dès lors, aurait pu être autre si Dieu l’avait voulu [Théorie des passions].

Ce dont Descartes ne peut encore s’apercevoir, c’est que nous pouvons le vouloir à sa place ; c’est que quelque cent cinquante ans après sa mort naît la théorie des ensembles — elle l’aurait comblé — où même les chiffres 1 et 0 ne sont que l’objet d’une définition littérale, d’une définition axiomatique purement formelle, éléments neutres. Il aurait pu faire l’économie du Dieu véridique, le Dieu trompeur ne pouvant être que celui qui tricherait dans la résolution des équations elles-mêmes. Mais personne n’a jamais vu ça ; il n’y a pas de miracle de la combinatoire, si ce n’est le sens que nous lui donnons. C’est déjà suspect chaque fois que nous lui donnons un sens. C’est pourquoi le Verbe existe, mais non pas le Dieu de Descartes. Pour que le Dieu de Descartes existe, il faudrait que nous ayons un petit commencement de preuve de sa volonté créatrice à lui dans le domaine des mathématiques. Or ce n’est pas lui qui a inventé le transfini de Cantor, c’est nous. C’est bien pourquoi l’histoire nous témoigne que les grands mathématiciens qui ont ouvert cet au-delà de la logique divine, Euler tout le premier, ont eu très peur. Ils savaient ce qu’ils faisaient ; ils rencontraient, non pas le vide de l’étendue du pas cartésien qui finalement, malgré Pascal, ne fait plus peur à personne, parce qu’on s’encourage à aller l’habiter de plus en plus loin, mais le vide de l’Autre, lieu infiniment plus redoutable, puisqu’il y faut quelqu’un. C’est pourquoi, serrant de plus près la question du sens du sujet tel qu’il s’évoque dans la méditation cartésienne, je ne crois là rien faire, même si j’empiète sur un domaine tant de fois parcouru qu’il finit par paraître en devenir réservé à certains, je ne crois pas faire quelque chose dont ils puissent se désintéresser, ceux-là mêmes, pour autant que la question est actuelle, plus actuelle qu’aucune, et plus actualisée encore, je crois pouvoir vous le montrer, dans la psychanalyse qu’ailleurs.

Ce vers quoi je vais donc aujourd’hui vous ramener, c’est à une considération, non de l’origine, mais de la position du sujet, pour autant qu’à la racine de l’acte de la parole il y a quelque chose, un moment où elle s’insère dans une structure de langage, et que cette structure de langage, en tant qu’elle est caractérisée à ce point originel, j’essaie de la resserrer, de la définir autour d’une thématique qui, de façon imagée, s’incarne, est comprise dans l’idée d’une contemporanéité originelle de l’écriture et du langage lui-même, en tant que l’écriture est connotation signifiante, que la parole ne la crée pas tant qu’elle ne la lit, que la genèse du signifiant, à un certain niveau du réel qui est un de ses axes ou racines, c’est pour nous sans doute le principal à connoter la venue au jour des effets dits effets de sens. Dans ce rapport premier du sujet, dans ce qu’il projette derrière lui nachträglich par le seul fait de s’engager par sa parole, d’abord balbutiante, puis ludique, voire confusionnelle, dans le discours commun, ce qu’il projette en arrière de son acte, c’est là que se produit ce quelque chose vers quoi nous avons le courage d’aller, pour l’interroger au nom de la formule Wo Es war, soll Ich werden, que nous tendrions à pousser vers une formule très légèrement différemment accentuée, dans le sens d’un étant ayant été, d’un Gewesen qui subsiste pour autant que le sujet, s’y avançant, ne peut ignorer qu’il faut un travail de profond retournement de sa position pour qu’il puisse s’y saisir. Déjà, là, quelque chose nous dirige vers quelque chose qui, d’être inversé, nous suggère la remarque qu’à soi toute seule, dans son existence, la négation n’est pas, depuis toujours, sans receler une question ; qu’est-ce qu’elle suppose ? Suppose-t-elle l’affirmation sur laquelle elle s’appuie ? Sans doute. Mais cette affirmation, est-ce bien, elle, seulement l’affirmation de quelque chose de réel qui serait simplement ôté ? Ce n’est pas sans surprise, ce n’est pas non plus sans malice que nous pouvons trouver, sous la plume de Bergson, quelques lignes par lesquelles il s’élève contre toute idée de néant, position bien conforme à une pensée dans son fond attachée à une sorte de réalisme naïf : « Il y a plus, et non pas moins, dans l’idée d’un objet conçu comme n’existant pas que dans l’idée de ce même objet conçu comme existant, car l’idée de l’objet n’existant pas est nécessairement l’idée de l’objet existant, avec, en plus, la représentation d’une exclusion de cet objet par la réalité actuelle prise en bloc ». Est-ce ainsi que nous pouvons nous contenter de le situer ? Pour un instant, portons notre attention vers la négation elle-même. C’est ainsi que nous pouvons nous contenter, dans une simple expérience de son usage, de son emploi, d’en situer les effets.

Vous menez à cet endroit par tous les chemins d’une enquête linguistique est quelque chose que nous ne pouvons-nous refuser. Au reste, déjà nous sommes-nous avancés dans ce sens, et si vous vous en souvenez bien, l’allusion a été faite ici dès longtemps aux remarques, certainement très suggestives sinon éclairantes, de Pichon et de Damourette dans leur collaboration à une grammaire fort riche et très féconde à considérer, grammaire spécialement de la langue française dans laquelle leurs remarques viennent à pointer qu’il n’y a pas, disent-ils, à proprement parler de négation en français. Ils entendent dire que cette forme, simplifiée à leur sens de l’ablation radicale telle qu’elle s’exprime à la chute de certaines phrases allemandes j’entends à la chute, parce que c’est bien le terme nicht qui, à venir d’une façon surprenante à la conclusion d’une phrase poursuivie en registre positif, a permis à l’auditeur de rester jusqu’à son terme dans la plus parfaite indétermination, et foncièrement dans une position de créance. Par ce nicht qui la rature, toute la signification de la phrase se trouve exclue. Exclue de quoi ? Du champ de l’admissibilité de la vérité. Pichon remarque, non sans pertinence, que la division, la schize la plus ordinaire en français de la négation entre un ne d’une part, et un mot auxiliaire le pas, la personne, le rien, le point, la mie, la goutte, qui occupent une position dans la phrase énonciative, qui reste à préciser, par rapport au ne nommé d’abord, que ceci vous suggère nommément, à regarder de près l’usage séparé qui peut en être fait, d’attribuer à l’une de ces fonctions une signification dite discordantielle, à l’autre une signification exclusive. C’est justement d’exclusion du réel que serait chargé le pas, le point, tandis que le ne exprimerait cette dissonance parfois si subtile qu’elle n’est qu’une ombre, et nommément dans ce fameux ne dont vous savez que j’ai fait grand état pour essayer pour la première fois, justement, d’y montrer quelque chose comme la trace du sujet de l’inconscient, le ne dit explétif, le ne de ce je crains qu’il ne vienne; vous touchez aussitôt du doigt qu’il ne veut rien dire d’autre que j’espérais qu’il vienne. Il exprime la discordance de vos propres sentiments à l’endroit de cette personne, il véhicule en quelque sorte la trace combien plus suggestive d’être incarnée dans son signifiant, puisque nous l’appelons en psychanalyse ambivalence. Je crains qu’il ne vienne, ce n’est pas tant exprimer l’ambiguïté de nos sentiments que, par cette surcharge, montrer combien, dans un certain type de relation, est capable de ressurgir, d’émerger, de se reproduire, de se marquer en une béance cette distinction du sujet de l’acte d’énonciation en tant que tel, par rapport au sujet de l’énoncé, même s’il n’est pas présent au niveau de l’énoncé d’une façon qui le désigne. Je crains qu’il ne vienne, c’est un tiers; ce serait, s’il était dit je crains que] e ne fasse, ce qui ne se dit guère, encore que ce soit concevable, qui serait au niveau de l’énoncé. Pourtant, ceci importe peu qu’il soit désignable, vous voyez d’ailleurs que je peux l’y faire rentrer, au niveau de l’énoncé, et un sujet, masqué ou pas au niveau de l’énonciation, représenté ou non, nous amène à nous poser la question de la fonction du sujet, de sa forme, de ce qui le supporte, et à ne pas nous tromper, à ne pas croire que c’est simplement le je [shifter] qui, dans la formulation de l’énoncé, le désigne comme celui qui, dans l’instant qui définit le présent, porte la parole.

Le sujet de l’énonciation a peut-être toujours un autre support. Ce que j’ai articulé c’est que, bien plus, ce petit ne, ici saisissable sous la forme explétive, c’est là que nous devons en reconnaître à proprement parler, dans un cas exemplaire, le support. Et aussi bien ce n’est pas dire, bien sûr, non plus que dans ce phénomène d’exception nous devions reconnaître son support exclusif. L’usage de la langue va me permettre d’accentuer devant vous d’une façon très banale, non pas tant la distinction de Pichon, à la vérité, je ne la crois pas soutenable jusqu’à son terme descriptif. Phénoménologiquement elle repose sur l’idée, pour nous inadmissible, qu’on puisse en quelque sorte fragmenter les mouvements de la pensée. Néanmoins, vous avez cette conscience linguistique qui vous permet tout de suite d’apprécier l’originalité du cas où vous avez seulement, où vous pouvez dans l’usage actuel de la langue… cela n’a pas toujours été ainsi, dans les temps archaïques, la forme que je vais maintenant formuler devant vous était la plus commune. Dans toutes les langues, une évolution se marque, comme d’un glissement, que les linguistes essaient de caractériser, des formes de la négation. Le sens dans lequel ce glissement s’exerce, j’en dirai peut-être tout à l’heure la ligne générale, elle s’exprime sous la plume des spécialistes, mais pour l’instant prenons le simple exemple de ce qui s’offre à nous, tout simplement dans la distinction entre deux formules également admissibles, également reçues, également expressives, également communes, celle du le ne sais avec j’sais pas. Vous voyez, je pense tout de suite quelle en est la différence, différence d’accent. Ce je ne sais n’est pas sans quelque maniérisme, il est littéraire. Il vaut quand même mieux que jeunes nations, mais il est du même ordre. Ce sont tous les deux Marivaux, sinon rivaux. Ce qu’il exprime, ce je ne sais, c’est essentiellement quelque chose de tout à fait différent de l’autre code d’expression, celui du j’sais pas; il exprime l’oscillation, l’hésitation, voire le doute. Si j’ai évoqué Marivaux, ce n’est pas pour rien; il est la formule ordinaire, sur la scène, où peuvent se formuler les aveux voilés. Auprès de ce je ne sais, il faudrait s’amuser à orthographier, avec l’ambiguïté donnée par mon jeu de mots, le j’sais pas par l’assimilation qu’il subit du fait du voisinage du s inaugural du verbe, le j’ du je qui devient un che aspirant qui est par là sifflante sourde. Le ne ici avalé disparaît, toute la phrase vient reposer sur le pas lourd de l’occlusive qui la détermine. L’expression ne prendra son accent d’accentuation un peu dérisoire, voire populacière à l’occasion, justement que de son discord avec ce qu’il y aura d’exprimé alors. Le ch’sais pas marque, si je puis dire, même le coup de quelque chose où tout au contraire le sujet vient se collapser, s’aplatir. « Comment ça t’est-il arrivé ? » demande l’autorité, après quelque triste mésaventure, au responsable. – « Ch’sais pas. » C’est un trou, une béance qui s’ouvre, au fond de laquelle ce qui disparaît, s’engouffre, c’est le sujet lui-même. Mais ici il n’apparaît plus dans son mouvement oscillatoire, dans le support qui lui est donné de son mouvement originel, mais tout au contraire sous une forme de constatation de son ignorance à proprement parler exprimée, assumée, plutôt projetée, constatée. C’est quelque chose qui se présente comme un n’être pas là projeté sur une surface, sur un plan où il est comme tel reconnaissable.

Et ce que nous approchons par cette voie dans ces remarques contrôlables de mille sortes, par toutes sortes d’autres exemples, c’est quelque chose dont au minimum nous devons retenir l’idée d’un double versant. Est-ce que ce double versant est vraiment d’opposition, comme Pichon le laisse entendre ? Quant à l’appareil lui-même, est-ce qu’un examen plus poussé peut nous permettre de le résoudre ? Remarquons d’abord que le ne de ces deux termes a l’air d’y subir l’attraction de ce qu’on peut appeler le groupe de tête de la phrase, pour autant qu’il est saisi, supporté par la forme pronominale. Ce peloton de tête, en fran-çais, est remarquable dans les formules qui l’accumulent, telles que le je ne le, je le lui; ceci, groupé avant le verbe, n’est certainement pas sans refléter une profonde nécessité structurale. Que le ne vienne [s] y agréger, je dirai que ce n’est pas là ce qui nous parait le plus remarquable. Ce qui nous parait le plus remarquable, c’est ceci, c’est qu’à venir s’y agréger, il en accentue ce que j’appellerai la significantisation subjective. Remarquez en effet que ce n’est pas un hasard si c’est au niveau d’un je ne sais, d’un je ne puis, d’une certaine catégorie qui est celle des verbes où se situe, s’inscrit la position subjective elle-même comme telle, que j’ai trouvé mon exemple d’emploi isolé de ne. Il y a en effet tout un registre de verbes dont l’usage est propre à nous faire remarquer que leur fonction change profondément, d’être employés à la première, ou à la seconde, ou à la troisième personne. Si je dis je crois qu’il va pleuvoir, ceci ne distingue pas, de mon énonciation qu’il va pleuvoir, un acte de croyance. Je crois qu’il va pleuvoir connote simplement le caractère contingent de ma prévision. Observez que les choses se modifient si je passe aux autres personnes; tu crois qu’il va pleuvoir fait beaucoup plus appel à quelque chose, celui à qui je m’adresse, je fais appel à son témoignage. Il croit qu’il va pleuvoir donne de plus en plus de poids à l’adhésion du sujet à sa créance. L’introduction du ne sera toujours facile quand il vient s’adjoindre à ces trois supports pronominaux de ce verbe qui a ici fonction variée; au départ, de la nuance énonciative jusqu’à l’énoncé d’une position du sujet, le poids du ne sera toujours pour le ramener vers la nuance énonciative. Je ne crois pas qu’il va pleuvoir, c’est encore plus lié au caractère de suggestion dispositionnelle qui est la mienne. Cela peut n’avoir absolument rien à faire avec une non-croyance, mais simplement avec ma bonne humeur. Je ne crois pas qu’il va pleuvoir, je ne crois pas qu’il pleuve, cela veut dire que les choses me paraissent pas trop mal se présenter. De même, à l’adjoindre aux deux autres formulations, ce qui d’ailleurs va distinguer deux autres personnes, le ne tendra à je-iser ce dont, dans les autres formules, il s’agit. Tu ne crois pas qu’il va pleuvoir, il ne croit pas qu’il doive pleuvoir, c’est bien en tant que. C’est bien attirés vers le je qu’ils seront, par le fait que c’est avec l’adjonction de cette petite particule négative qu’ils sont ici introduits dans le premier membre de la phrase.

Est-ce à dire qu’en face nous devions faire dupas quelque chose qui, tout brutalement, connote le pur et simple fait de la privation ? Ce serait assurément la tendance de l’analyse de Pichon, pour autant qu’il en trouve en effet, à grouper les exemples, à donner toutes les apparences. En fait je ne le crois pas, pour des raisons qui tiennent d’abord à l’origine même des signifiants dont il s’agit. Sûrement, nous avons la genèse historique de leur forme d’introduction dans le langage. Originellement, je n’y vais pas peut s’accentuer par une virgule, je n’y vais, pas un seul pas, si je puis dire. Je n’y vois point, même pas d’un point, je n’y trouve goutte, il n’en reste mie, il s’agit bien de quelque chose qui, loin d’être dans son origine la connotation d’un trou d’absence, exprime bien au contraire la réduction, la disparition sans doute, mais non achevée, laissant derrière elle le sillage du trait le plus petit, le plus évanouissant. En fait, ces mots faciles à restituer à leur valeur positive, au point qu’ils sont couramment encore employés avec cette valeur, reçoivent bien leur charge négative du glissement qui se produit vers eux de la fonction du ne, et même si le ne est élidé, c’est bien, sur eux, de sa charge qu’il s’agit, dans la fonction qu’il exerce. Quelque chose, si l’on peut dire, de la réciprocité, disons, de ce pas et de ce ne nous sera apporté par ce qui se passe quand nous inversons leur ordre dans l’énoncé de la phrase. Nous disons, exemple de logique: « Pas un homme qui ne mente ». C’est bien là le pas qui ouvre le feu. Ce que j’entends ici désigner, vous faire saisir, c’est que le pas, pour ouvrir la phrase, ne joue absolument pas la même fonction qui lui serait attribuable, aux dires de Pichon, si celle-ci était celle qui s’exprime dans la formule suivante, j’arrive et je constate: « Il n’y a ici pas un chat. »

Entre nous, laissez-moi vous signaler au passage la valeur éclairante, privilégiée, voire redoutable de l’usage même d’un tel mot, pas un chat. Si nous avions à faire le catalogue des moyens d’expression de la négation, je proposerais que nous mettions à la rubrique ce type de mots pour devenir comme un support de la négation. Ils ne sont pas du tout sans constituer une catégorie spéciale. Qu’est-ce que le chat a à faire dans la question ? Mais laissons cela pour le moment. Pas un homme qui ne mente montre sa différence avec ce concert de carence, quelque chose qui est tout à fait à un autre niveau et qui est suffisamment indiqué par l’emploi du subjonctif. Le pas un homme qui ne mente est du même niveau qui motive, qui définit toutes les formes les plus discordantielle, pour employer le terme de Pichon, que nous puissions attribuer au ne, depuis le je crains qu’il ne vienne jusque le avant qu’il ne vienne, jusqu’au plus petit que] e ne le croyais, ou encore il y a longtemps que le ne l’ai vu, qui posent, je vous le dis au passage, toutes sortes de questions que je suis pour l’instant forcé de laisser de côté. je vous fais remarquer en passant ce que supporte une formule comme il y a longtemps que je ne l’ai vu, vous ne pouvez pas le dire à propos d’un mort, ni d’un disparu. Il y a longtemps que je ne l’ai vu suppose que la prochaine rencontre est toujours possible.

Vous voyez avec quelle prudence l’examen, l’investigation de ces termes doit être maniée. Et c’est pourquoi, au moment de tenter d’exposer, non pas la dichotomie, mais un tableau général des divers niveaux de la négation dans laquelle notre expérience nous apporte des entrées de matrice autrement plus riches que tout ce qui s’était fait au niveau des philosophes, depuis Aristote jusqu’à Kant, et vous savez comment elles s’appellent, ces entrées de matrices, privation, frustration, castration; c’est elles que nous allons essayer de reprendre, pour les confronter avec le support signifiant de la négation tel que nous pouvons essayer de l’identifier. Pas un homme qui ne mente. Qu’est-ce que nous suggère cette formule. « Homo mendax », ce jugement, cette proposition que je vous présente sous la forme type de l’affirmative universelle, à laquelle vous savez peut-être que dans mon tout premier séminaire de cette année j’avais déjà fait allusion, à propos de l’usage classique du syllogisme: « tout homme est mortel, Socrate… etc. », avec ce que j’ai connoté au passage de sa fonction transférentielle ? Je crois que quelque chose peut nous être apporté dans l’approche de cette fonction de la négation, au niveau de l’usage originel, radical, par la considération du système formel des propositions telles qu’Aristote les a classées dans les catégories dites de l’universelle affirmative et négative, et de la particulière dite également négative et affirmative, A E I O. Disons-le de suite, ce sujet dit de l’opposition des propositions, origine chez Aristote de toute son analyse, de toute sa mécanique du syllogisme, n’est pas sans présenter, malgré l’apparence, les plus nombreuses difficultés. Dire que les développements de la logistique la plus moderne ont éclairé ces difficultés serait très certainement dire quelque chose contre quoi toute l’histoire s’inscrit en faux. Bien au contraire, la seule chose qu’elle peut faire apparaître, étonnante, c’est l’apparence d’uniformité dans l’adhésion que ces formules dites aristotéliciennes ont rencontrée jusqu’à Kant, puisque Kant gardait l’illusion que c’était là un édifice inattaquable. Assurément ce n’est pas rien de pouvoir, par exemple, faire remarquer que l’accentuation de leur fonction affirmative et négative n’est pas articulée comme telle dans Aristote lui-même, et que c’est beaucoup plus tard, avec Averroès probablement, qu’il convient d’en marquer l’origine. C’est vous dire qu’aussi bien les choses ne sont pas aussi simples, quand il s’agit de leur appréciation.

Pour ceux à qui besoin est de faire un rappel de la fonction de ces propositions, je vais les rappeler brièvement. Homo mendax, puisque c’est ce que j’ai choisi pour introduire ce rappel, prenons-le donc, homo, et même omnis homo, omnis homo mendax, tout homme est menteur. Quelle est la formule négative? Selon une forme [qui porte], et en beaucoup de langues, omnis homo non mendax peut suffire. Je veux dire que omnis homo non mendax veut dire que, de tout homme, il est vrai qu’il ne soit pas menteur. Néanmoins, pour la clarté, c’est le terme nullus que nous employons, nullus homo mendax. Voilà ce qui est connoté habituellement par la lettre, respectivement, A et E de l’universelle affirmative et de l’universelle négative.

Que va-t-il se passer au niveau des affirmatives particulières ? Puisque nous nous intéressons à la négative, c’est sous une forme négative que nous allons pouvoir ici les introduire. Non omnis homo mendax, ce n’est pas tout homme qui est menteur, autrement dit je choisis et je constate qu’il y a des hommes qui ne sont pas menteurs. En somme, ceci ne veut pas dire que quiconque, aliquis, ne puisse être menteur, aliquis homo mendax, telle est la particulière affirmative habituellement désignée dans la notation classique par la lettre 1. Ici, la négative particulière, O, sera, le non omnis étant ici résumé par nullus, non nullus homo non mendax, il n’y a pas aucun homme qui ne soit pas menteur. En d’autres termes, dans toute la mesure où nous avions choisi ici, O, de dire que pas tout homme n’était menteur, ceci l’exprime d’une autre façon, à savoir que ce n’est pas aucun qu’il y ait à être non menteur. Les termes ainsi organisés se distinguent, dans la théorie classique, par les formules suivantes qui les mettent réciproquement en positions dites de contraires ou de subcontraires, c’est-à-dire que les propositions universelles A et E s’opposent à leur propre niveau comme ne sachant et ne pouvant être vraies en même temps. Il ne peut en même temps être vrai que tout homme puisse être menteur et que nul homme ne puisse être menteur, alors que toutes les autres combinaisons sont possibles. Il ne peut en même temps être faux qu’il y ait des hommes menteurs et des hommes non menteurs. L’opposition dite contradictoire est celle par laquelle les propositions situées dans chacun de ces quadrants s’opposent diagonalement, A-O et E-1, en ceci que chacune exclut, étant vraie, la vérité de celle qui lui est opposée au titre de contradictoire, et étant fausse exclut la fausseté de celle qui lui est opposée à titre de contradictoire. S’il y a des hommes menteurs, I, ceci n’est pas compatible avec le fait que nul homme ne soit menteur, E. Inversement, le rapport est le même de la particulière négative, O avec l’affirmative, A.

Qu’est-ce que je vais vous proposer, pour vous faire sentir ce qui, au niveau du texte aristotélicien, se présente toujours comme ce qui s’est développé dans l’histoire d’embarras autour de la définition comme telle de l’universelle ?

Observez d’abord que si ici je vous ai introduit le non omnis homo mendax, O, le pas tout, le terme pas portant sur la notion du tout comme définissant la particulière, ça n’est pas que ceci soit légitime, car précisément Aristote s’y oppose d’une façon qui est contraire à tout le développement qu’a pu prendre ensuite la spéculation sur la logique formelle, à savoir un développement, une explication en extension faisant intervenir la carcasse symbolisable par un cercle, par une zone dans laquelle les objets constituant son support sont rassemblés. Aristote, très précisément avant les Premiers analytiques, tout au moins dans l’ouvrage qui antécède dans le groupement de ses œuvres, mais qui apparemment l’antécède logiquement sinon chronologiquement, qui s’appelle De l’interprétation, fait remarquer que – et non sans avoir provoqué l’étonnement des historiens – ce n’est pas sur la qualification de l’universalité que doit porter la négation. C’est donc bien d’un quelque, aliquis, homme qu’il s’agit, et d’un quelque homme que nous devons interroger comme tel comme menteur. La qualification, donc, de l’omnis, de l’omnitude, de la parité de la catégorie universelle, est ici ce qui est en cause. Est-ce que c’est quelque chose qui soit du même niveau, du niveau d’existence de ce qui peut supporter ou ne pas supporter l’affirmation ou la négation? Est-ce qu’il y a homogénéité entre ces deux niveaux? Autrement dit, est-ce que c’est de quelque chose qui simplement suppose la collection comme réalisée qu’il s’agit, dans la différence qu’il y a de l’universelle à la particulière ?

Bouleversant la portée de ce que le suis en train d’essayer de vous expliquer, je vais vous proposer quelque chose, quelque chose qui est fait en quelque sorte pour répondre à quoi ? A la question qui lie, justement, la définition du sujet comme tel à celle de l’ordre d’affirmation ou de négation dans lequel il entre dans l’opération de cette division propositionnelle. Dans l’enseignement classique de la logique formelle, il est dit- et si l’on recherche à qui ça remonte, je vais vous le dire, ce n’est pas sans être quelque peu piquant -, il est dit que le sujet est pris sous l’angle de la qualité, et que l’attribut que vous voyez ici incarné par le terme mendax est pris sous l’angle de la quantité. Autrement dit, dans l’un ils sont tous, ils sont plusieurs, voire il y en a un. C’est ce que Kant conserve encore, au niveau de la Critique de la Raison pure, dans la division ternaire. Ce n’est pas sans soulever, de la part des linguistes, de grosses objections. Quand on regarde les choses historiquement, on s’aperçoit que cette distinction qualité-quantité a une origine; elle apparaît pour la première fois dans un petit traité, paradoxalement, sur les doctrines de Platon, et cela – c’est au contraire l’énoncé aristotélicien de la logique formelle qui est reproduit, d’une façon abrégée, mais non sans période didactique, et l’auteur n’est ni plus ni moins qu’Apulée, l’auteur d’un traité sur Platon – se trouve avoir ici une singulière fonction historique, c’est à savoir d’avoir introduit une catégorisation, celle de la quantité et de la qualité, dont le moins qu’on puisse dire c’est que c’est de s’être introduit et d’être resté aussi longtemps dans l’analyse des formules logiques, qu’on l’y a introduit

Voici en effet le modèle autour duquel je vous propose pour aujourd’hui de centrer votre réflexion. Voici un quadrant [1] dans lequel nous allons mettre des traits verticaux. La fonction trait va remplir celle du sujet, et la fonction verticale, qui est d’ailleurs choisie simplement comme support, celle d’attribut. J’aurais bien pu dire que je prenais comme attribut le terme unaire, mais pour le côté représentatif et imaginable de ce que j’ai à vous montrer, je les mets verticaux. Ici [3], nous avons un segment de cadran où il y a des traits verticaux mais aussi des traits obliques. Ici [2] il n’y a pas de trait. Ce que ceci est destiné à illustrer, c’est que la distinction universelle-particulière, en tant qu’elle forme un couple distinct de l’opposition affirmative-négative, est à considérer comme un registre tout différent de celui qu’avec plus ou moins d’adresse des commentateurs, à partir d’Apulée, ont cru devoir diriger dans ces formules si ambiguës, glissantes et confusionnelles qui s’appellent respectivement la qualité et la quantité, et de l’opposer en ces termes. Nous appellerons l’opposition universelle-particulière une opposition de l’ordre de la leksis, ce qui est pour nous lego [legein], je lis, aussi bien je choisis, très exactement liée à cette fonction d’extraction, de choix du signifiant, qui est ce sur quoi pour l’instant, le terrain, la passerelle sur laquelle nous sommes en train de nous avancer. C’est pour la distinguer de la phasis, c’est-à-dire de quelque chose qui ici se propose comme une parole par où, oui ou non, je m’engage quant à l’existence de ce quelque chose qui est mis en cause par la leksis première. Et en effet, vous allez le voir, de quoi est-ce que je vais pouvoir dire tout trait est vertical ? Bien sûr, du premier secteur du cadran [1], mais, observez-le, aussi du secteur vide [2]. Si je dis, tout trait est vertical, ça veut dire, quand il n’y a pas de verticale, il n’y a pas de trait. En tout cas c’est illustré par le secteur vide du cadran. Non seulement le secteur vide ne contredit pas, n’est pas contraire à l’affirmation tout trait est vertical, mais l’illustre. Il n’y a nul trait qui ne soit vertical dans ce secteur du cadran. Voici donc illustrée par les deux premiers secteurs l’affirmative universelle.

La négative universelle va être illustrée par les deux secteurs de droite [2 et 4], mais ce dont il s’agit là se formulera par l’articulation suivante, nul trait n’est vertical. Il n’y a là, dans ces deux secteurs, nul trait vertical. Ce qui est à remarquer, c’est le secteur commun [2] que recouvrent ces deux propositions qui, selon la formule, la doctrine classique, en apparence ne sauraient être vraies en même temps. Qu’est-ce que nous allons trouver, suivant notre mouvement giratoire qui a ainsi fort bien commencé; ici 0, comme formule, ainsi qu’ici 1, pour désigner les deux autres groupements possibles deux par deux des quadrants ? Ici 1, nous allons voir le vrai de ces deux quadrants sous une forme affirmative, il y a, je le dis d’une façon phasique, je constate l’existence de traits verticaux, il y a des traits verticaux, il y a quelques traits verticaux, que je peux trouver soit ici [1] toujours, soit ici [3] dans les bons cas. Ici, si nous essayons de définir la distinction de l’universelle et de la particulière, nous voyons quels sont les deux secteurs [3 et 4] qui répondent à l’énonciation particulière O, là il y a des traits non verticaux, non nullus non verticales. De même que tout à l’heure nous avons été un instant suspendus à l’ambiguïté de cette répétition de la négation, le non… non… est très loin d’être équivalent forcément au oui, et c’est quelque chose vers quoi nous aurons à revenir dans la suite. Qu’est-ce que cela veut dire ? Quel est l’intérêt pour nous de nous servir d’un tel appareil ? Pourquoi est-ce que j’essaie pour vous de détacher ce plan de la lexis du plan de la phasis ? je vais y aller tout de suite, et pas par quatre chemins, et je vais l’illustrer.

Qu’est-ce que nous pouvons dire, nous analystes ? Qu’est-ce que Freud nous enseigne ? Puisque le sens en a été complètement perdu, de ce qu’on appelle proposition universelle, depuis justement une formulation dont on peut mettre la tête de chapitre à la formulation eulérienne qui arrive à nous représenter toutes les fonctions du syllogisme par une série de petits cercles, soit s’excluant les uns les autres, se recoupant, s’intersectant, en d’autres termes et à proprement parler en extension, à quoi on oppose la compréhension qui serait distinguée. Simplement par je ne sais quelle inévitable manière de comprendre. De comprendre quoi? Que le cheval est blanc? Qu’est-ce qu’il y a à comprendre ? Ce que nous apportons qui renouvelle la question, c’est ceci; je dis que Freud promulgue, avance la formule qui est la suivante: le père est Dieu ou tout père est Dieu. Il en résulte, si nous maintenons cette proposition au niveau universel, celle qu’il n’y a d’autre père que Dieu, lequel d’autre part, quant à l’existence, est dans la réflexion freudienne plutôt aufgehoben, plutôt mis en suspension, voire en doute radical. Ce dont il s’agit, c’est que l’ordre de fonction que nous introduisons avec le Nom du père est ce quelque chose qui, à la fois a sa valeur universelle, mais qui vous remet à vous, à l’autre, la charge de contrôler s’il y a un père ou non de cet acabit.

S’il n’y en a pas, il est toujours vrai que le père soit Dieu. Simplement, la formule n’est confirmée que par le secteur vide [2] du cadran, moyennant quoi, au niveau de la phasis, nous avons il y a des pères qui remplissent plus ou moins la fonction symbolique que nous devons dénoncer comme telle, comme étant celle du Nom du père, il y en a qui, et il y en a que pas. Mais, qu’il y en ait que pas qui soient pas dans tous les cas, ce qui ici est supporté par ce secteur [4], c’est exactement la même chose qui nous donne appui et base à la fonction universelle du Nom du père, car, groupé avec le secteur dans lequel il n’y a rien [2], c’est justement ces deux secteurs, pris au niveau de la lexis, qui se trouvent, en raison de celui-ci, de ce secteur supporté qui complémente l’autre, qui donnent sa pleine portée à ce que nous pouvons énoncer comme affirmation universelle.

je vais l’illustrer autrement, puisque aussi bien jusqu’à un certain point la question a pu être posée de sa valeur,) e parle par rapport à un enseignement traditionnel, qui doit être ce que j’ai apporté la dernière fois concernant le petit i. Ici, les professeurs discutent: « qu’est-ce que nous allons dire ? » Le professeur, celui qui enseigne, doit enseigner quoi ? Ce que d’autres ont enseigné avant lui. C’est-à-dire qu’il se fonde sur quoi ? Sur ce qui a déjà subi une certaine lexis. Ce qui résulte de toute lexis, c’est justement ce qui nous importe en l’occasion, et au niveau de quoi j’essaie de vous soutenir aujourd’hui, la lettre. Le professeur est lettré; dans son caractère universel, il est celui qui se fonde sur la lettre au niveau d’un énoncé particulier. Nous pouvons dire maintenant qu’il peut l’être moitié moitié, il peut ne pas être tout lettré. Il en résultera que quand même on ne puisse dire qu’aucun professeur soit illettré, il y aura toujours dans son cas un peu de lettre. Il n’en reste pas moins que si par hasard il y avait un angle sous lequel nous puissions dire qu’il y en a éventuellement, sous un certain angle, qui se caractérisent comme donnant lieu à une certaine ignorance de la lettre, ceci ne nous empêcherait pas pour autant de boucler la boucle et de voir que le retour et le fondement, si l’on peut dire, de la définition universelle du professeur est très strictement en ceci, c’est que l’identité de la formule que le professeur est celui qui s’identifie à la lettre impose, exige même le commentaire qu’il peut y avoir des professeurs analphabètes. La case négative [2], comme corrélative essentielle de la définition de l’universalité, est quelque chose qui est profondément caché au niveau de la lexis primitive.

Ceci veut dire quelque chose; dans l’ambiguïté du support particulier que nous pouvons donner dans l’engagement de notre parole au Nom du père comme tel, il n’en reste pas moins que nous ne pouvons pas faire que quoi que ce soit qui, aspiré dans l’atmosphère de l’humain si je puis m’exprimer ainsi, puisse si l’on peut dire, se considérer comme complètement dégagé du Nom du père. Que même ici [2 vide] où il n’y a que des pères pour qui la fonction du père est, si je puis m’exprimer ainsi, de pure perte, le père non-père, la cause perdue sur laquelle a terminé mon séminaire de l’année dernière, c’est néanmoins en fonction de cette déchéance, par rapport à une première leksis qui est celle du Nom du père, que se juge cette catégorie particulière. L’homme ne peut faire que son affirmation ou sa négation, avec tout ce qu’elle engage, celui-là est mon père, ou celui-là est son père, ne soit pas entièrement suspendue à une lexis primitive dont, bien entendu, ça n’est pas du sens commun, du signifié du père qu’il s’agit, mais de quelque chose à quoi nous sommes provoqués ici de donner son véritable support, et qui légitime, même aux yeux des professeurs – qui, vous le voyez, seraient en grand danger d’être toujours mis en quelque suspens quant à leur fonction réelle – qui, même au yeux des professeurs, doit justifier que j’essaie de donner, même à leur niveau de professeurs, un support algorithmique à leur existence de sujet comme tel.

 

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