MASOCHISME
- masochiste E67: Freud, dans son “Au-delà” fait place au fait que le principe de plaisir à quoi il donne en somme un sens nouveau d’en installer dans le circuit de la réalité, comme processus primaire, l’articulation signifiante de la répétition, vient à en prendre un plus nouveau encore de prêter au forçage de sa barrière traditionnelle du côté d’une jouissance -dont l’être alors s’épingle du masochisme, voir s’ouvre sur la question de la mort.
- masochiste E115 PRIMORDIAL: il y a intérêt d’éliminer de l’orbite où s’ordonnent /…/ les rapports /…/ de la tension de culpabilité, de la nocivité orale, de la fixation hypochondriaque, voire de ce masochisme primordial /…/ pour en isoler la notion d’une agressivité liée à la relation narcissique et aux structures de méconnaissance et d’objectivation systématiques qui caractérisent la formation du moi.
- masochiste E318 IDEM: [la limite de la fonction historique du sujet est la mort] Tel est le mort dont la subjectivité fait son partenaire dans la triade que sa médiation institue dans le conflit universel de Philia /…/ et Neikos /…/ Il n’est plus besoin dès lors de recourir à la notion périmée du masochisme primordial pour comprendre la raison des jeux répétitifs où la subjectivité fomente tout ensemble la maîtrise de sa déréliction et la naissance du symbole.
- masochiste E730: Suit le problème du masochisme féminin qui déjà se signale à promouvoir une pulsion partielle, soit, qu’on la qualifie ou non de prégénitale, régressive dans sa condition, au rang de pôle de la maturité génitale.
- masochiste E731 Peut-on se fier à ce que la perversion masochiste doit à l’invention masculine, pour conclure que le masochisme de la femme est un fantasme du désir de l’homme?
- masochisme L02, 271:Oedipe à Colone?, dont l’être est tout entier dans la parole formulée par son destin, présentifie la conjonction de la mort et de la vie . /…/ la vie est une boursoufflure, une moisissure, elle n’est caractérisée par rien d’autre /…/ que par son aptitude à la mort . /…/ Ce que FREUD nous enseigne avec le masochisme primordial, c’est que le dernier mot de la vie, lorsqu’elle a été dépossédée de sa parole, ne peut être que la malédiction dernière qui s’exprime au terme d’Oedipe à Colone. La vie ne veut pas guérir. La réaction thérapeutique négative lui est foncière . La guérison, d’ailleurs, qu’est-ce que c’est? La réalisation du sujet par une parole qui vient d’ailleurs et le traverse .
- masochiste L11 187 : j’ai montré encore que, dans le rapport foncier de la pulsion, le mouvement est essentiel pour quoi la flèche qui part vers la cible ne remplit pas sa fonction qu’à réellement en émaner, pour revenir sur le sujet. Le pervers en ce sens, est celui qui, en court-circuit, plus directement qu’aucun autre, réussit son coup, en intégrant le plus profondément sa fonction de sujet à son existence de désir. La réversion de la pulsion est là tout autre chose que la variation d’ambivalence qui fait passer l’objet du champ de la haine à celui de l’amour et inversement, selon qu’il profite ou non au bien-être du sujet . Ce n’est que lorsque l’objet n’est pas bon à sa visée qu’on devient masochiste. Ce n’est pas parce que son père la déçoit que la petite malade de FREUD, dite homosexuelle, devient homosexuelle, elle aurait pu prendre un amant. Chaque fois que nous sommes dans la dialectique de la pulsion, autre chose commande. La dialectique de la pulsion se distingue foncièrement de ce qui est de l’ordre de l’amour comme de ce qui est du bien du sujet. C’est pourquoi je veux accentuer aujourd’hui les opérations de la réalisation du sujet dans sa dépendance signifiante au lieu de l’Autre.
- masochiste L13 2/2/66 68 AMOUREUX DE VOTRE ANGOISSE: La pulsion épistémologique c’est la vérité qui s’offre comme jouissance et /…/ par là défendue, car qui pourrait jouir de la vérité? /…/ “vous voudriez en savoir plus [dit le patient] /…/ mais si vous vous acceptez comme juge vous voilà rejeté” /…/ Sans doute ici /…/ l’avertissement de n’avoir pas à aller plus loin, “car, dit le patient, vous me rendrez masochiste, c’est-à-dire amoureux de votre angoisse /…/ car il suffit que je m’identifie à vous pour que vous voyez bien que ce n’est pas de moi que vous jouirez” … la vérité est passée dans le réel.
- masochiste L13 2/2/66 72 PASCAL: Les gestes de Pascal dans une vie, dont on a raison de manifester les faces extrêmement complexes, les gestes tels qu’ils s’achèvent dans l’approche de la mort, dans tel vœu /…/ d’être emmené aux incurables pour achever son existence, se serait bien vite l’épingler de relever la thématique masochiste.
- masochiste L13 2/2/66 67-68: pour définir le masochiste, nous pourrions dire au départ “qu’il en veut”, formule non pas vague mais minimale du désir. Tout désir alors serait-il d’être désir et en lui-même masochiste?
- masochiste L14 10/5/67 LEF5 63 BERGLER: La théorie analytique ne saurait faire l’économie d’une recherche sur ce que veut dire “être refusé” /…/ “être refusé” dans ce registre [de la lutte à mort, besoin de mordre et peut d’être dévoré], serait alors la conséquence de toute tentative pour se sauver de l’engloutissement par le partenaire maternel. Mais répondre ainsi serait peut-être trop simple, surtout si l’on associe à cette “névrose orale” la dimension du masochisme, que Bergler par deux fois lui accole, pour dénoter le côté essentiellement humiliant du refus. Or il est inexact de dire que ce qui caractérise le masochisme c’est le fait d’assumer comme tel le côté pénible d’une situation. Cela aboutit proprement à cet abus qui consiste à faire de la dimension sado-masochiste le registre essentiel de la relation analytique, ce qui est absolument insoutenable et représente une véritable perversion autant de la pensée de Freud que de la théorie et de la pratique .
- masochiste L14 14/6/67 LEF5 97: ce reclassement l’un par rapport à l’autre du sujet et de la jouissance a lieu dans le fantasme, sous une forme d’une absolutisation de la jouissance de l’Autre, si bien que Sade doit construire, lui athée, cette figure pourtant bien manifestement théiste: celle de la jouissance d’une méchanceté absolue /…/ c’est dans la pratique masochiste que vous en est proprement donnée la vérité, pour autant que le masochiste, pour soutirer une jouissance au seul coin où elle est manifestement saisissable, qui est l’objet “a”, se livre délibérément à une identification à cet objet comme rejeté.
- masochiste L14 15/2/67 LEF3 12: le désir du névrosé tourne autour de quelque chose que l’on ne peut articuler autrement que comme une demande de l’Autre /…/ ce qui le mène /…/ à demander que l’Autre lui demande quelque chose. C’est aussi de l’angoisse de l’autre que dérive /…/ la position du sujet masochiste. Enfin un point de jouissance est essentiellement repérable comme jouissance de lAutre [JA], notation sans laquelle il est impossible de comprendre ce dont il s’agit dans la perversion.
- masochiste L14 31/5/67 LEF5 78: celui qui, à en croire Hegel, n’a pu tenir dès le départ le risque de perdre sa vie /…/ celui qui a assez tenu à la jouissance pour se soumettre et aliéner son corps, hé, pourquoi la jouissance ne lui resterait-elle pas en main? Je ne sais quel fantasme veut que le bouquet complet soit toujours dans une seule main. Il n’en est rien; et nous avons mille témoignages de ceci, que la position de celui dont le corps est remis à la merci de l’autre est celle qui permet le mieux l’ouverture sur ce qui peut s’appeler la pure jouissance. Cela doit d’ailleurs permettre de comprendre la position paradoxale du masochiste; mais nous reviendrons là-dessus, car le masochiste n’est justement pas esclave mais un petit malin, quelqu’un de très fort. S’il est en effet pensable que la condition de l’esclave soit la seule qui donne accès à la jouissance nous n’en saurons jamais rien, dans la mesure où nous ne pouvons la formuler qu’en tant que sujet.
- masochiste L14 31/5/67 LEF5 83: Aussi ne saurais-je trop insister sur ce fait que sadisme et masochisme sont des recherches sur la voie de ce qu’est l’acte sexuel et que s’il y a des rapports sadiques entre telle ou telle unité du corps social, ils figurent quelque chose qui intéresse les rapports de l’homme et de la femme. /…/ Un personnage que je dois dire d’une incroyable naïveté”, écrit quelque part ce truisme: “Le masochiste n’a rien de spécifiquement féminin”; la raison qu’il donne étant qu’on n’aurait plus alors affaire à une perversion, puisqu’il serait “naturel” à la femme d’être masochiste /…/
- masochiste L17 8/4/70 18: ce “faut le temps” est proprement ce par quoi l’être nous sollicite en l’inconscient. /…/ ce falloir retourne à la faille /…/ de la modalité subjonctive de la défaillance (“à moins qu’il faille”). A quel niveau pour l’articulation de l’inconscient trouver l’attache du dire à l’heure. Assurément le temps ui fait étoffe (mais pas un cours imaginaire); disons qu’elle soit textile, faite de nœuds qui veulent dire que des trous s’y trouvent. Ce niveau n’a pas d’en soi, sinon ce qui en choit [enchois] de masochiste. C’est ce que précisément le psychanalyste relève de le relayer de quelqu’Un. Il va supporter le faux du temps aussi longtemps qu’il faudra pour qu’à se dire, l’étant fasse être quelque chose. /…/ Il n’y a qu’un savoir à faire la médiation du vrai, c’est la logique. /…/ ce fut le fait des stoïciens non sans cohérence avec la morale d’un masochisme politisé. [vrai de nature vs vrai de pure texture].
- masochiste L18 9/6/71 9: Les hommes que le semblant embarrasse /…/ Ceux que je désigne ainsi ce sont les sages, les masochistes. Il faut les ramener à leur juste plan.
- masochiste L23 11/5/76 7: Le masochisme en effet n’est pas du tout exclu des possibilités de stimulations sexuelles de Joyce, il y a assez insisté concernant Bloom. Mais cette fois il n’a pas joui, il a eu une réaction de dégoût concernant son propre corps, le sentiment du détachement de quelque chose comme une pelure [mapping], comme quelqu’un qui met entre perenthèses et chasse le mauvais souvenir. La forme du laisser-tomber du rapport au corps propre, est tout à fait suspecte pour un analyste.
- sadique L06 15/4/59 DI 511: Ce qui est important dans cet élément /…/ structurel du fantasme imaginaire, en tant qu’il se situe au niveau du “a”, c’est 1) d’une part, ce caractère opaque, celui qui se spécifie sous les formes les plus accentuées comme le pôle du désir pervers; en d’autres termes: qui en fait l’élément structurel des perversions et nous montre donc que la perversion se caractérise en ceci, que tout l’accent du fantasme est mis du côté du corrélatif proprement imaginaire de l’autre, “a”, ou de la parenthèse [a+b+c, etc.] . 2) Néanmoins, ce qui est essentiel /…/ c’est de vous rappeler que, si bizarre que puisse être dans son aspect de fantasme du désir pervers, le désir y est toujours de quelque façon intéressé. Intéressé dans un rapport qui est toujours lié au pathétique, à la douleur d’exister [E666] comme telle [cf. Médias & Show-biz], d’exister tout purement [SDF], ou d’exister comme terme sexuel [féminisme]. C’est évidemment dans la mesure où celui qui subit l’injure dans le fantasme sadique est quelque chose qui intéresse le sujet, en tant que lui-même peut être offert à cette injure, que le fantasme sadique subsiste [ça ne se rapporte pas à une pure et simple agression primitive].