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Recherches Lacan

LII LE MOI DANS LA THÉORIE DE FREUD ET DANS LA TECHNIQUE DE LA PSYCHANALYSE 1954-1955 Leçon du 23 mars 1955

Leçon du 23 mars 1955 (version établi par Jacque Alain Miller – Seuil)

Je regrette que notre bon ami Riguet ne soit pas là aujourd’hui, car nous allons toucher à des questions sur lesquelles il aurait peut-être pu nous donner des lumières. Nous allons refrôler les données de ce qu’on appelle confusément la cybernétique, qui n’en est pas moins quelque chose qui nous intéresse au plus haut point dans la petite affaire que nous poursuivons depuis deux séminaires, qu’est-ce que le sujet ?, en tant qu’il est, techniquement, au sens freudien du terme, le sujet inconscient, et par là, essentiellement le sujet qui parle.

Or, il nous apparaît de plus en plus clairement que ce sujet qui parle est au-delà de l’ego.

 

Repartons de l’acmé du rêve exemplaire de l’injection d’Irma. La recherche du rêve, pour autant qu’elle prolonge la recherche de la veille, arrive à la béance, à cette bouche ouverte au fond de laquelle Freud voit cette image terrifiante et composite que nous avons comparée à la révélation de la tête de Méduse.

L’exemple de ce rêve n’est pas unique. Ceux qui ont participé à mes séminaires l’année d’avant qu’ils ne se tiennent ici peuvent se souvenir du caractère singulier du rêve de l’homme aux loups, dont on pourrait dire qu’il a, sur l’ensemble de l’analyse de ce cas, une fonction analogue au point d’acmé que nous discernons dans le rêve de l’injection d’Irma. Il intervient en effet après une longue période d’analyse dont Freud lui­ même note le caractère très intellectualisé — terme qui n’est pas dans le texte, mais qui correspond bien à ce que Freud veut dire -, sorte de jeu analytique, qui constitue pourtant une recherche authentique de la part du sujet, mais reste très longtemps en surface, et comme inopérant. C’est une analyse stagnante et qui s’annonce interminable, quand enfin apparaît le rêve, renouvelé à propos d’une occasion précise de la vie du sujet, et qui prend toute sa portée de s’être maintes fois répété depuis une certaine époque de l’enfance.

Qu’est-ce que ce rêve ? C’est l’apparition, au-delà d’une fenêtre brus­quement ouverte, du spectacle d’un grand arbre, sur les branches duquel sont perchés des loups. Dans le rêve et dans le dessin que le sujet nous en a légué et que Freud a reproduit, ils sont assez énigmatiques pour que nous puissions légitimement nous demander si ce sont bien des loups, car ils ont de singulières queues de renard, sur lesquelles nous nous sommes déjà arrêtés naguère. Ce rêve, vous le savez, se révèle d’une extrême richesse, et les associations qu’il déclenche mèneront Freud et son sujet à rien de moins qu’à la découverte purement supposée, recons­truite, de la scène primitive.

La scène primitive est reconstruite à partir des recoupements qui s’opèrent dans la suite de l’analyse, elle n’est pas revécue. Rien ne surgit dans la mémoire du sujet — nous aurons à nous interroger sur ce terme de mémoire — qui puisse faire parler d’une résurrection de la scène, mais tout impose la conviction qu’elle s’est bien passée de telle façon. Il y a donc à cet égard, entre cette scène et ce que le sujet voit dans le rêve, une béance bien plus significative que la distance normale du contenu latent au contenu manifeste d’un rêve. Et cependant, dans les deux cas, il y a une vision fascinante, laquelle suspend pour un temps le sujet dans une captivation où il se perd.

La vision du rêve apparaît à Freud comme le renversement de la fascination du regard. C’est dans le regard de ces loups, si angoissant dans le compte rendu qu’en donne le rêveur, que Freud voit l’équivalent du regard fasciné de l’enfant devant la scène qui l’a marqué profondé­ment dans l’imaginaire, et a dévié toute sa vie instinctuelle. Il y a là comme une révélation unique et décisive du sujet, où se concentre je ne sais quoi d’indicible, où le sujet est pour un instant perdu, éclaté. Comme dans le rêve de l’injection d’Irma le sujet se décompose, s’éva­nouit, se dissocie en ses divers moi. De même, après le rêve de l’homme aux loups, nous assistons au premier commencement de l’analyse, qui permet de dissocier à l’intérieur du sujet une personnalité si singulière­ment composite qu’elle marque l’originalité du style du cas. Comme vous le savez, les problèmes pendants de cette analyse seront si graves que dans la suite elle pourra dégénérer dans la psychose. Comme je vous l’ai indiqué, on peut se poser la question de savoir si celle-ci n’a pas été liée aux manceuvres mêmes de l’analyse.

Dans les deux rêves en question, nous nous trouvons devant une sorte de vécu dernier, devant l’appréhension d’un réel ultime. Ce qu’il y a de plus angoissant dans la vie de Freud, ses rapports avec les femmes, ses rapports avec la mort, sont télescopés dans la vision centrale de son rêve, et pourraient certainement en être extraits par une analyse associative. Image énigmatique à propos de laquelle Freud évoque l’ombilic du rêve, cette relation abyssale au plus inconnu qui est la marque d’une expérience privilégiée exceptionnelle, où un réel est appréhendé au-delà de toute médiation, qu’elle soit imaginaire ou symbolique. En bref, on pourrait dire que de telles expériences privilégiées, et spécia­lement semble-t-il dans le rêve, sont caractérisées par le rapport qui s’y établit à un autre absolu, je veux dire à un autre au-delà de toute intersubjectivité.

C’est tout spécialement sur le plan imaginaire que cet au-delà du rapport intersubjectif est atteint. Il s’agit d’un dissemblable essentiel, qui n’est ni le supplément ni le complément du semblable, qui est l’image même de la dislocation, du déchirement essentiel du sujet. Le sujet passe au-delà de cette vitre où il voit toujours, mêlée, sa propre image. C’est la cessation de toute interposition entre le sujet et le monde. On a le sentiment qu’il y a passage dans une sorte d’a-logique, et c’est bien là que commence le problème, car nous voyons que nous n’y sommes point. Et pourtant le logos n’y perd pas tous ses droits, puisque c’est là que commence la signification essentielle du rêve, sa signification libéra­toire, puisque c’est de là que Freud a trouvé l’échappatoire à sa culpabilité latente. De la même façon, c’est au-delà de l’expérience terrifiante du rêve de l’homme aux loups que le sujet trouvera la clé de ses problèmes.

C’est aussi bien la question que nous rencontrions dans la petite réunion scientifique d’hier soir — dans quelle mesure le rapport symbo­lique, le rapport de langage, garde-t-il sa valeur au-delà du sujet, pour autant qu’il peut être caractérisé comme centré dans un ego, par un ego, pour un alter-ego ?

La connaissance humaine, et du même coup la sphère des rapports de la conscience, est faite d’un certain rapport à cette structure que nous appelons l’ego, autour de laquelle se centre la relation imaginaire. Celle-ci nous a appris que l’ego n’est jamais seulement le sujet, qu’il est essentiellement rapport à l’autre, qu’il prend son départ et son point d’appui dans l’autre. C’est de cet ego que tous les objets sont regardés. Mais c’est bien du sujet, d’un sujet primitivement désaccordé, fonda­mentalement morcelé par cet ego, que tous les objets sont désirés. Le sujet ne peut pas désirer sans lui-même se dissoudre, et sans voir, de ce fait même, l’objet lui échapper, dans une sérié de déplacements infinis — je fais allusion ici à ce que j’appelle, de façon abrégée, le désordre fondamental de la vie instinctuelle de l’homme. Et c’est de la tension entre le sujet — qui ne saurait désirer sans être fondamentalement séparé de l’objet — et l’ego, d’où part le regard vers l’objet, que prend son départ la dialectique de la conscience.

J’ai essayé de forger devant vous le mythe d’une conscience sans ego, qui pourrait être définie comme le reflet de la montagne dans un lac. L’ego apparaît, lui, dans le monde des objets, comme un objet, certes privilégié. La conscience chez l’homme est par essence tension polaire entre un ego aliéné au sujet et une perception qui fondamentalement lui échappe, un pur percipi. Le sujet serait strictement identique à cette perception, s’il n’y avait cet ego qui le fait, si l’on peut dire, émerger de sa perception même dans un rapport tensionnel. Dans certaines conditions, ce rapport imaginaire atteint lui-même sa propre limite, et l’ego s’éva­nouit, se dissipe, se désorganise, se dissout. Le sujet est précipité dans un affrontement avec quelque chose qui ne peut être aucunement confondu avec l’expérience quotidienne de la perception, quelque chose que nous pourrions nommer un id, et que nous appellerons simplement, pour ne pas faire de confusion, un quod, un qu’est-ce que c’est ? La question que nous allons nous poser aujourd’hui est celle de cet affron­tement du sujet au-delà de l’ego au quod qui cherche à advenir dans l’analyse.

Une interrogation est-elle seulement soutenable sur ce quod ultime, qui est celui de l’expérience du sujet inconscient en tant que tel, dont nous ne savons plus qui il est ? L’évolution de l’analyse elle-même nous met à cet égard dans un singulier embarras, pour autant qu’elle tient pour donnée irréductible ces tendances du sujet que d’un autre côté elle nous montre perméables, traversées et structurées comme des signifiants, jouant, au-delà du réel, dans le registre du sens, sur l’équivalence du signifié et du signifiant dans son aspect le plus matériel, jeux de mots, calembours, mots d’esprit — ce qui aboutit en fin de compte à l’aboli­tion des sciences humaines, en ceci que le dernier mot du mot d’esprit, c’est de démontrer la suprême maîtrise du sujet par rapport au signifié lui-même, puisqu’il en fait tous les usages, qu’il en joue essentiellement pour l’anéantir.

Il y a maintenant une expérience exemplaire sur laquelle j’aimerais attirer votre attention, et qui sera pour nous un premier pas dans l’éluci­dation de ce sur quoi s’interroge un qui s que nous ne connaissons pas, dans cet au-delà de la relation imaginaire où l’autre est absent et où toute intersubjectivité apparemment se dissout.

 

Vous savez qu’on fait grand état dans la cybernétique des machines à calculer. On a été jusqu’à les appeler des machines à penser, pour autant qu’assurément certaines sont capables de résoudre des problèmes de logique, conçus il est vrai assez artificiellement pour un instant em-brouiller l’esprit, de sorte qu’on s’y retrouve moins facilement qu’elles.

Nous n’allons pas entrer aujourd’hui dans ces arcanes. On ne prend pas les mouches avec du vinaigre, et, pour ne pas vous inspirer trop d’aversion pour cet exercice, je vais essayer de vous introduire dans ce domaine d’une façon plus amusante. Nous n’avons jamais eu de mépris pour la physique amusante et les récréations mathématiques – on peut en tirer beaucoup.

Parmi ces machines à calculer ou à penser, on en a élucubré d’autres, attachantes par leur singularité – ce sont les machines qui jouent, inscrites dans le fonctionnement et, singulièrement, dans les limites, d’une certaine stratégie.

Du seul fait qu’une machine peut entrer dans une stratégie, nous sommes déjà au cœur du problème. Car enfin, qu’est-ce qu’une straté­gie? Comment une machine peut-elle y participer? Je vais essayer au­jourd’hui de vous faire sentir les vérités élémentaires qui sont emportées par cela.

On a, paraît-il, construit une machine qui joue le jeu de pair ou impair. Je ne réponds de rien carie ne l’ai pas vue, mais je vous promets que d’ici la fin de ces séminaires j’irai la voir – notre bon ami Riguet m’a dit qu’il me confronterait à elle. Il faut avoir l’expérience de ces choses, on ne peut pas parler d’une machine sans avoir un peu tiré dessus, vu ce que ça donne, fait des découvertes même sentimentales. Le plus fort est que la machine dont je vous parle arrive à gagner. Vous connaissez le jeu, vous avez encore des souvenirs d’école. On a dans la main deux ou trois billes, et on présente la main fermée à l’adversaire en disant – Pair ou impair? J’ai, mettons deux billes, et s’il dit impair, il doit m’en abouler une. Et on continue.

Tâchons de considérer un instant ce que ça veut dire qu’une machine joue au jeu de pair ou impair. Nous ne pouvons pas tout reconstruire de . notre propre chef, parce que ça aurait l’air un peu élucubré pour la circonstance. Un petit texte vient à notre secours, d’Edgar Poe, dont je me suis aperçu que les cybernéticiens faisaient quelque cas. Ce texte est dans la Lettre volée, nouvelle absolument sensationnelle, qu’on pourrait même considérer comme fondamentale pour un psychanalyste.

Les personnages intéressés à la recherche de la lettre volée, dont j’aurai à vous reparler tout à l’heure, sont deux policiers. L’un est le préfet de police, c’est-à-dire selon les conventions littéraires, un imbécile. L’autre n’est rien du tout, c’est un policier amateur d’une intelligence fou­droyante, nommé Dupin, qui préfigure les Sherlock Holines et autres héros de ces romans dont vous vous nourrissez à vos heures. Celui-ci s’exprime ainsi –

J’ai connu un enfant de huit ans, dont l’infaillibilité au jeu de pair ou impair faisait l’admiration universelle. Ce jeu est simple, on y joue avec des billes. L’un des joueurs tient dans sa main un certain nombre de ses billes, et demande à l’au­tre : « Pair ou non? » Si celui-ci devine juste, il gagne une bille; s’il se trompe, il en perd une. L’enfant dont je parle gagnait toutes les billes de l’école. Naturel­lement, il avait un mode de divination, lequel consistait dans la simple observa­tion et dans l’appréciation de la finesse de ses adversaires. Supposons que son adversaire soit un parfait nigaud et, levant sa main fermée, lui demande : « Pair ou impair? » Notre écolier répond : « Impair! » et il a perdu. Mais à la seconde épreuve, il gagne, car il se dit en lui-même : « Le niais avait mis pair la première fois, et toute sa ruse ne va qu’à lui faire mettre impair à la seconde; je dirai donc

« Impair! » Il dit : « Impair », et il gagne.

Maintenant, avec un adversaire un peu moins simple, il aurait raisonné ainsi « Cegarçon voit que, dans le premier cas, j’ai dit impair, et que, dans le second, il se proposera – c’est la première idée qui se présentera à lui – une simple varia­tion de pair à impair comme a fait le premier bêta; mais une seconde réflexion lui dira que c’est là un changement trop simple, et finalement il se décidera à mettre pair comme la première fois. -Je dirai donc : « Pair! » Il dit pair et gagne. Maintenant, ce mode de raisonnement de notre écolier, que ses camarades appel­lent la chance, – en dernière analyse, qu’est-ce que c’est?

– C’est simplement, dis-je, une identification de l’intellect de notre raison­neur avec celui de son adversaire.

– C’est cela même, dit Dupin; et, quand je demandai à ce petit garçon par quel moyen il effectuait cette parfaite identification qui faisait tout son succès, il me fit la réponse suivante

« Quand je veux savoir jusqu’à quel point quelqu’un est circonspect ou stu­pide, jusqu’à quel point il est bon ou méchant, ou quelles sont actuellement ses pensées, je compose mon visage d’après le sien, aussi exactement que possible, et j’attends alors pour savoir quels pensers ou quels sentiments naîtront dans mon esprit ou dans mon cœur, comme pour s’appareiller et correspondre avec ma phy­sionomie. »

Cette réponse de l’écolier enfonce de beaucoup toute la profondeur sophistique attribuée à La Rochefoucauld, à La Bruyère, à Machiavel et à Campanella. – Et l’identification de l’intellect du raisonneur avec celui de son adversaire dépend, si je vous comprends bien, de l’exactitude avec laquelle l’intellect de l’ad­versaire est apprécié.

Nous sommes là devant un raisonnement qui pose un certain nombre de problèmes.

Au premier abord, il s’agit d’une simple pénétration psychologique, d’une sorte d’egomimie. Le sujet adopte une position en miroir qui lui permet de deviner le comportement de son adversaire. Néan­moins, cette méthode même suppose déjà la dimension de l’intersub­jectivité, en ceci que le sujet doit savoir qu’il a en face de lui un autre sujet, en principe homogène à lui-même. Les variations auxquelles il peut être sujet ont beaucoup moins d’importance que les scansions pos­sibles de la position de l’autre. Il n’y a pas d’autre appui au raisonnement psychologique.

Quelles sont ces scansions? Il y a un premier temps où je suppose l’au­tre sujet exactement dans la même position que moi, pensant ce que je pense au moment même où je le pense. Supposons qu’il me semble, à moi, qu’il soit plus naturel que l’autre change de thème, qu’il passe du pair à l’impair par exemple. Au premier temps, je crois que c’est ce qu’il fera. L’important est qu’il peut y avoir un second temps, qui manifeste une subjectivité plus dégagée. Le sujet en effet est capable de se faire au­tre, et d’en arriver à penser que l’autre, étant un autre lui-même, pense comme lui, et qu’il lui faut se mettre en tiers, sortir de cet autre qui est son pur reflet. Comme tiers, je m’aperçois que si cet autre-là ne joue pas le jeu, il trompe son adversaire. Et dès lors je le devance, en tablant sur la position contraire à celle qui me paraissait, au premier temps, comme la plus naturelle.

Mais après ce second temps, vous pouvez en supposer un troisième, qui rend extrêmement difficile la poursuite du même raisonnement par analogie. Après tout, quelqu’un de supérieurement intelligent peut jus­tement comprendre que l’astuce est, malgré qu’il paraisse très intelli­gent, de jouer comme un imbécile, c’est-à-dire de revenir à la première formule. Qu’est-ce que cela veut dire? Ceci- si le jeu de pair ou impair est joué au niveau de la relation duelle, de l’équivalence de l’autre à l’un, de l’alter ego à l’ego, vous apercevez très vite que vous n’avez atteint au­cune espèce de second degré, puisque vous revenez par oscillation au premier, dès que vous pensez au troisième. Cela n’exclut pas que quel­que chose dans la technique du jeu ne participe en effet de l’identification mythique à l’adversaire. Mais il y a là une bifurcation fondamentale.

Il se peut que s’exerce quelque chose comme une divination, d’ailleurs problématique, du sujet dans un certain rapport sympathique avec l’ad­versaire. Il n’est pas exclu qu’il ait existé, ce petit enfant qui gagnait plus souvent qu’à son tour – ce qui est la seule définition qu’on puisse don­ner du mot gagner en l’occasion. Mais le fond de la question se situe dans un tout autre registre que celui de l’intersubjectivité imaginaire.

Que le sujet pense l’autre semblable à lui, et qu’il raisonne comme il pense que l’autre doit raisonner – premier temps comme ceci, second temps comme cela -est un point de départ fondamental sans lequel rien ne peut être pensé, mais pourtant tout à fait insuffisant à nous faire péné­trer d’une façon quelconque où le ressort du succès peut résider. L’expé­rience interpsychologique, je ne la considère pas comme exclue en cette occasion, mais elle s’insère dans le cadre fragile du rapport imaginaire avec l’autre, et elle est suspendue à son incertitude même. A l’intérieur de ce cadre, l’expérience est complètement évanouissante. Elle n’est pas lo­gicisable. Reportez-vous à la dialectique du jeu des disques noirs et blancs, mis sur le dos de trois personnages qui doivent deviner quel est leur propre signe à partir de ce qu’ils voient sur les deux autres. Vous pourrez découvrir une chose du même ordre.

Nous allons prendre l’autre voie, celle qui est logicisable, qui peut être soutenue dans le discours. Elle s’impose évidemment dès lors que votre partenaire est la machine.

Il est clair que vous n’avez pas à vous demander si la machine est idiote ou intelligente, si elle va jouer d’après son premier ou son second mou­vement. Inversement, la machine n’a aucun moyen de se mettre dans une position réflexive par rapport à son partenaire humain.

Qu’est-ce que c’est que de jouer avec une machine? La physionomie de la machine, si avenante que nous la supposions, ne peut être d’aucune espèce de secours en cette occasion. Aucune façon de s’en sortir par voie d’identification. On est donc d’emblée projeté dans la voie du langage, de la combinatoire possible de la machine. On sait qu’on peut attendre de la machine une série de liaisons, jouant avec une excessive rapidité grâce à ces relais sensationnels que sont les phases électroniques et, aux der­nières nouvelles, ces transistors dont on nous rebat les oreilles dans les journaux, dans un dessein commercial sans doute, mais qui ne met pas en cause la qualité de ces objets.

Mais avant de nous demander ce que va faire la machine, deman­dons-nous ce que veut dire gagner et perdre au jeu de pair ou impair. Sur un seul coup, cela n’a aucun espèce de sens. Que votre réponse coïncide avec ce qu’il y a dans la main du partenaire n’est pas plus éton­nant que le contraire. Pour un coup, ça n’a pas de sens, sinon purement conventionnel, de gagner ou de perdre. Pair, impair, ça n’a véritablement aucune espèce d’importance. Souvenez-vous tout de même que la meil­leure traduction du numéro impair est le numéro deux, lequel se réjouit d’être impair, et il a bien raison, car s’il n’avait pas lieu de se réjouir d’être impair, il ne serait pas pair non plus. Donc, il suffit de renverser ce jeu en un jeu de qui perd gagne, pour qu’aussi bien il soit mis en évidence que les choses sont équivalentes.

Ce qui est plus surprenant, c’est de perdre ou de gagner deux fois de suite. Car si sur un coup on a 50 % de chances de chaque côté, on a seulement 25 % de chances de répéter son coup la seconde fois. Et au troisième coup, il n’y a plus que 12,5 % de chances que nous continuions de gagner ou de perdre.

Cela est d’ailleurs purement théorique, car à partir de là, je vous prie de remarquer que nous ne sommes plus du tout dans l’ordre du réel, mais dans celui de la signification symbolique que nous avons définie par ces plus-moins et ces moins plus. Du point de vue du réel, il y a toujours à chaque coup autant de chances que vous gagniez ou perdiez. La notion même de probabilités et de chances suppose l’introduction d’un symbole dans le réel. C’est à un symbole que vous vous adressez, et vos chances ne portent que sur un symbole. Dans le réel, à chaque coup, vous avez tout autant de chances de gagner ou de perdre qu’au coup précédent. Il n’y a aucune raison que, par pur hasard, vous ne gagniez pas dix fois de suite. Cela ne commence à prendre un sens que quand vous écrivez un signe, et tant que vous n’êtes pas là pour l’écrire, il n’y a aucune espèce de gain. Le pacte du jeu est fondamental pour la réalité de l’expérience poursuivie.

Voyons maintenant ce qui va se passer avec la machine.

Ce qu’il y a d’amusant, c’est que vous êtes amenés à faire les mêmes gestes que vous feriez avec un partenaire. En poussant un bouton, vous lui posez une question sur un quod qui est là dans votre main, et dont il s’agit de savoir ce que c’est. Cela vous indique déjà que ce n’est peut-être pas la réalité, ce quod, mais un symbole. C’est sur un symbole que vous posez une question à une machine dont la structure doit bien avoir quelque parenté avec l’ordre symbolique, et c’est justement en cela qu’elle est une machine à jouer, une machine stratégique. Mais n’entrons pas dans le détail.

La machine est construite de telle sorte qu’elle donne une réponse. Vous aviez plus dans la main. Elle donne comme réponse moins. Elle a perdu. Le fait qu’elle a perdu consiste uniquement dans la dissemblance du plus et du moins.

Il faut que vous avertissiez la machine qu’elle a perdu en inscrivant un moins. Je ne sais pas du tout si c’est comme ça que la machine fonctionne, mais ça m’est parfaitement égal – elle ne peut pas fonctionner autre­ment, et si elle fonctionne autrement, c’est équivalent à cela.

Cette machine qui doit en principe me battre, comment peut-elle bien être fichue? Va-telle jouer au hasard? Cela n’a aucune espèce de signifi­cation. Il peut se faire que pendant les trois premières réponses elle dise toujours la même chose, ce n’est pas là la question. C’est dans la succes­sion de ses réponses que nous avons les premiers fondements du phéno­mène.

Supposons qu’au départ la machine soit très bête – ça n’a aucune espèce d’importance qu’elle soit bête ou intelligente, puisque le suprême de l’intelligence est d’être bête. Mettons que pour commencer, elle réponde toujours la même chose. Il se trouve que moi, qui suis intelli­gent, je dis plus. Comme elle me répond encore moins, ça me met sur la voie. Je me dis que la machine doit être un peu inerte -je pourrais aussi bien me dire le contraire – et de fait supposons qu’elle perde encore.

C’est ici que doit forcément intervenir dans la construction de ma machine le fait que nous avons joué plusieurs coups. Ici commence à entrer enjeu un autre organisme de la machine, qui enregistre qu’elle a perdu trois fois -je n’en suis pas sûr, mais je peux le supposer. D’ail­leurs, comme je suis très intelligent, mais quand même pas si intelligent que ça, je peux supposer que la machine tout bêtement change et que moi je reste un peu lent en l’occasion. Cette fois la machine gagne.

1 + –

2 + –

3 + –

4 + +

Au bout de trois fois, ayant perdu, la machine, donc, commence à réagir. Qu’est-ce que je vais faire? Je me dis qu’elle va peut-être persé­vérer, et alors j’inverse mon truc. Supposons que je gagne.

5 – +

Je ne suis pas forcé de faire ce raisonnement, mais je veux vous en montrer les limites. Je peux me dire que la machine, maintenant qu’elle a gagné, va attendre le troisième coup pour se modifier. Je pense donc qu’elle va jouer plus encore une fois, et je joue moins. Mais supposez que le second organisme entre en jeu quand il y a eu trois fois moins. A ce moment-là, ma machine joue moins, et gagne à nouveau.

6 – –

Je vous fais remarquer que la machine a gagné deux fois de façon assez proche. Ce n’est pas pour vous démontrer que, comme ça, la machine va gagner. Mais selon la complexité du mécanisme élaboré, et les organis­mes successifs à quoi peuvent s’étayer un certain nombre de renseigne­ments qui sont de plus et de moins, des transformations qui pourront être à leur tour coordonnées entre elles, finiront par donner une modulation temporelle analogue à ce qui se produit dans l’affrontement des deux personnages. Il suffit de supposer une machine assez compliquée pour avoir suffisamment d’organismes superposés groupant un nombre assez grand d’antécédents – au lieu d’en grouper trois, elle peut en grouper huit ou dix -et sa portée dépassera mon entendement. Néanmoins elle ne peut pas dépasser sa reproduction sur le papier, c’est-à-dire que je peux moi aussi l’éprouver, à condition que je refasse moi-même toute la combinatoire avant de la tâter. Je suis donc là dans une espèce de rivalité avec elle.

Je veux vous faire remarquer qu’il n’y a, dans ces conditions, aucune raison que ce soit plutôt la machine qui gagne que moi, si ce n’est ma fatigue. A reconstituer le nombre d’organismes qui sont dans cette machine, les ensembles pris à chaque instant par elle pour déterminer son jeu, je peux être mis devant des problèmes d’une telle complexité mathématique qu’il me faille recourir – appréciez l’humour – à une machine à calculer.

Mais pour l’instant, je ne joue pas à pair ou impair, je joue à deviner le jeu de la machine. Maintenant, je vais commencer à jouer, et chercher ce qui va se passer.

On peut supposer la machine capable de faire un profil psychologique de son adversaire. Mais je vous ai fait remarquer tout à l’heure que celui-ci ne fonctionne qu’à l’intérieur du cadre de l’intersubjectivité. Toute la question se résume à savoir si l’autre est assez astucieux pour savoir que, moi aussi, je suis un autre pour lui, s’il est capable de franchir ce second temps. Si je le suppose identique à moi-même, je le suppose du même coup capable de penser de moi ce que je suis en train de penser de lui, et de penser que je vais penser qu’il va faire le contraire de ce qu’il pense que je suis en train de penser. Oscillation simple qui revient toujours. De ce seul fait, tout ce qui est de l’ordre du profil psychologi­que est strictement éliminé.

Que se passe-t-il si, par contre, je joue au hasard? Vous connaissez ce chapitre de la Psychopathologie de la vie quotidienne, où il s’agit de faire sortir un chiffre au hasard. Voilà une expérience qui échappe certaine­ment à la métaphore bien connue du lapin dont on recommande toujours de se souvenir qu’il a été mis préalablement dans le chapeau. Freud – avec la collaboration de son sujet, mais c’est bien parce que le sujet parle à Freud que ça marche -, Freud le premier s’avise qu’un numéro tiré du chapeau fera rapidement sortir les choses qui porteront le sujet à ce moment où il a couché avec sa petite sueur, voire à l’année où il a manqué son baccalauréat parce que ce matin-là il s’était masturbé. Si nous admettons ces expériences, il faut poser qu’il n’y a pas de hasard. Pendant que le sujet n’y pense pas, les symboles continuent à se chevau­cher, à copuler, à proliférer, à se féconder, à se sauter dessus, à se déchirer. Et quand vous en tirez un, vous pouvez projeter sur lui une parole de ce sujet inconscient dont nous parlons.

En d’autres termes, quand bien même le mot de ma vie serait à chercher dans quelque chose d’aussi long qu’un chant entier de l’Enéide, il n’est pas impensable qu’une machine arrive avec le temps à le recons­tituer. Or, toute machine peut se réduire à une série de relais qui sont simplement de plus et de moins. Tout, dans l’ordre symbolique, peut être représenté à l’aide d’une telle succession.

Il ne faut pas confondre l’histoire où s’inscrit le sujet inconscient, avec sa mémoire – mot dont je ne serai pas le premier à vous faire remarquer qu’il est d’un usage confus. Il importe, au contraire, au point où nous en sommes, de faire une démarcation très nette entre la mémoire et la remémoration, qui est de l’ordre de l’histoire.

On a pu parler de mémoire pour distinguer le vivant comme tel. On dit ainsi qu’une substance vivante, après une certaine expérience, se trouve subir une transformation telle qu’elle ne réagira pas à la même expérience de la même façon qu’auparavant. Cela reste fort ambigu – réagir différemment, qu’est-ce que cela veut dire? dans quelles limi­tes? Ne plus réagir du tout, n’est-ce pas là un effet de la mémoire ? L’expérience mortelle, définitivement enregistrée, est-ce une mémoire? Retrouver l’équilibre dans les limites d’une certaine homéostase, est-ce une mémoire? En tous les cas, il n’y a aucune raison d’identifier cette mémoire, propriété définissable de la substance vivante, avec la remémoration, groupement et succession d’événements symboliquement définis, pur symbole engendrant à son tour une succession.

Ce qui se passe dans la machine à ce niveau, pour ne parler que de celui-là, est analogue à la remémoration à quoi nous avons affaire dans l’analyse. En effet, la mémoire est ici le résultat d’intégrations. Le premier organisme adjuvant la première mémoire est fait d’un orga­nisme qui groupe les résultats par trois. Ce résultat, mémorisé, est à chaque instant prêt à intervenir. Mais l’instant suivant, il peut fort bien n’être plus du tout le même. II se peut qu’il ait changé de contenu, de signe, de structure. Si une erreur s’introduit au cours de l’expérience, que se passe-t-il? Ce n’est pas ce qui vient après qui est modifié, mais tout ce qui est avant. Nous avons un effet d’après-coup – nachträglich, comme Freud l’exprime – spécifique de la structure de mémoire sym­bolique, autrement dit de la fonction de remémoration.

Je pense que ce petit apologue, avec son caractère problématique, vous introduit à ceci, que pour qu’il y ait un sujet qui interroge, il suffit qu’existe le quod sur quoi porte l’interrogation. Avons-nous même à nous préoccuper de ce qu’est ce sujet et par rapport à quel autre il se situe? C’est complètement inutile. L’essentiel est le quod symbolique. C’est pour le sujet comme une image en miroir, mais d’un autre ordre – ce n’est pas pour rien qu’Ulysse crève l’œi1 du cyclope. Le sujet, en tant qu’il parle, peut entièrement trouver sa réponse, son retour, son secret, son mystère, dans le symbole construit que nous représentent les machi­nes modernes, soit quelque chose de bien plus acéphale encore que ce que nous avons rencontré dans le rêve de l’injection d’Irma.

C’est poser la question des rapports de la signification avec l’homme vivant.

 

Nous étions tout à l’heure à évoquer la Lettre volée. On ne fait dans ce conte que tourner autour des problèmes de la signification, du sens, de l’opinion reçue, et précisément parce que l’opinion reçue est commune, la vérité y est en jeu.

Vous savez le thème de l’histoire. Le préfet de police est chargé de retrouver une lettre qui a été dérobée par un grand personnage parfaite­ment amoral. Le personnage en question a subtilisé cette lettre sur la table du boudoir de la reine. La lettre lui venait d’un autre personnage qui avait avec elle des relations qu’elle avait des raisons de cacher. Elle ne réussit pas à dérober la lettre aussi vite qu’elle le veut, mais le geste qu’elle esquisse fait assez voir au ministre libertin, coupable et héros, l’importance du papier. Elle fait comme si de rien n’était, pose la missive en évidence. Quant au roi, qui est là lui aussi, il est destiné par définition à ne rien remarquer, à condition qu’on n’attire pas son attention. C’est ce qui permet au ministre, par une manœuvre qui consiste à sortir une lettre vaguement analogue, et à la poser sur la table, de s’emparer au nez et à la barbe – puisque la barbe est là -des assistants, de cette lettre qui sera pour lui la source d’un pouvoir considérable sur les personnages royaux, sans que personne puisse rien dire. La reine s’aperçoit très bien de ce qui se passe, mais elle est bloquée par la condition même du jeu à trois.

Cette lettre, il s’agit de la retrouver. Il y a toutes sortes de spéculations, dont on entend un écho à propos du jeu de pair ou impair, qui font comprendre que le jeu de l’intersubjectivité est si essentiel qu’il suffit que quelqu’un soit chargé de technique, de savoir, et de rigueur, pour qu’il soit fasciné par le réel, comme le sont les gens très intelligents, en quoi ils sont strictement imbéciles. On fouille la maison du ministre pouce par pouce, en numérotant chaque décimètre cube. On regarde les choses au microscope, on passe de longues aiguilles à travers les coussins, toutes les méthodes scientifiques sont employées. Et on ne trouve pas la lettre. La lettre pourtant ne peut être que dans la maison, car le ministre doit pouvoir s’en servir à tout instant et la foutre sous le nez du roi. Il ne la porte pas sur lui, car on l’a fait dévaliser.

On joue là sur l’idée très séduisante que plus les policiers agiront comme des policiers et moins ils trouveront. Il ne leur viendra pas à l’idée que la lettre est là sous leur nez, pendue à un ruban au-dessus d’une cheminée. Le voleur s’est contenté de lui donner un caractère usagé, de la camoufler en la retournant et en lui mettant un cachet différent. Le per­sonnage excessivement malin, et qui a des raisons d’en vouloir au mi­nistre, ne manque pas l’occasion de prendre la lettre et de lui en substituer une autre qui fera la chute de son ennemi.

Mais l’essentiel n’est pas là. Qu’est-ce qui fait le côté convaincant de cette histoire si peu convaincante? On est étonné malgré tout que les po­liciers n’aient pas trouvé la lettre au cours de toutes leurs fouilles. Pour l’expliquer, Poe met en avant l’intersubjectivité – le type très fort va à l’extrémité de l’impensable pour l’autre, et comme tel il échappera. Mais si vous lisez le conte dans sa valeur fondamentale, vous vous apercevez qu’il y a une autre clé, qui fait tout tenir, et qui emporte la conviction, alors que l’histoire construite un peu autrement ne nous intéresserait pas une minute.

Cette clé, il me semble que, vous autres analystes, vous devez la re­connaître tout de suite- c’est simplement l’identité de la formule sym­bolique de la situation, aux deux étapes majeures de son développement. La reine a pensé que la lettre était préservée parce qu’elle était là devant tout le monde. Et le ministre, lui aussi, la laisse en évidence, la pensant par là imprenable. Ce n’est pas parce qu’il est un stratège, c’est parce qu’il est un poète, qu’il gagne, jusqu’à l’intervention du super-poète, qui est Dupin.

Aucune espèce d’intersubjectivité n’est là décisive, parce qu’une fois serrées les mesures du réel, une bonne fois définis un périmètre, un vo­lume, il n’y a rien qui permette de penser qu’en fin de compte même une lettre échappe. Si pourtant le fait qu’on ne la trouve pas emporte la conviction, c’est que le domaine des significations continue à exister, même dans l’esprit de gens supposés aussi bêtes que des policiers. Si les policiers ne la trouvent pas, ce n’est pas seulement parce qu’elle est dans un endroit trop accessible, mais en raison de cette signification, qu’une lettre d’un grand prix, autour de laquelle sont accumulées les foudres de l’État et les récompenses qui peuvent être accordées en pareil cas, ne peut qu’être cachée soigneusement. Tout naturellement l’esclave suppose que le maître est un maître, et que quand il a à sa portée quelque chose de précieux, il met la main dessus. De la même façon, on croit que, quand on est arrivé à un certain point de compréhension de la psychanalyse, on peut mettre la main dessus et dire – Elle est là, c’est nous qui l’avons. Au contraire, la signification comme telle n’est jamais là où on croit qu’elle doit être.

La valeur de l’apologue est de cet ordre-là. C’est à partir de l’analyse de la valeur symbolique des différents moments du drame que peut se dé­couvrir sa cohérence, et même sa motivation psychologique.

Ce n’est pas un jeu au plus fin, ce n’est pas un jeu psychologique, c’est un jeu dialectique.

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