samedi, juillet 27, 2024
Recherches Lacan

LXIII L'OBJET DE LA PSYCHANALYSE 1965 – 1966 Leçon du 8 décembre 1965

Leçon du 8 décembre 1965

 

La dernière fois, vous avez entendu, de moi, une sorte de leçon qui ne res­semblait pas aux autres parce qu’il se trouve qu’elle était entièrement écrite aux fins d’être donnée au plus vite à une sorte d’impression qu’on appelle ronéoty­pie et que vous puissiez l’avoir comme repère, eu égard à mon enseignement. Certains en ont émis un certain regret, disons, une déception.

La chose vaut qu’on s’y arrête. Pour y mettre un peu d’humour, je dirai que la façon dont cette déception s’exprimait était quelque chose autour de ceci – je force un peu – c’est qu’on préférait cette sorte de bagarre, paraît-­il, que représente le fait d’assister – j’ose à peine le dire – à la naissance de ma pensée.

Vous pensez si ma pensée naît quand je suis là, en train de me colleter avec quelque chose qui est loin d’être tout à fait ça. Comme tout le monde, c’est avec ma parole, bien sûr, que je m’explique. Cela prouve, bien entendu, qu’elle s’est formée ailleurs. D’ailleurs, vous avez peut-être pu entendre que mon cogito à moi, ce qui ne veut pas dire qu’il est en quoi que ce soit en contradiction avec le cogito de Descartes, ce serait peut-être plutôt : « je pense donc je cesse d’être ». Alors, comme je ne cesse pas d’être, comme vous le voyez bien, ça prouve que ma pensée, j’ai moins de raison que d’autres d’y croire.

Néanmoins, il est bien certain que c’est à cela que nous avons affaire. C’est ce qui ne rend pas les rapports plus faciles avec ceux à qui elle s’adresse plus spé­cialement, c’est-à-dire, les psychanalystes. Et le fait que les remarques de tout à l’heure me soient venues, je le répète avec une pointe d’humour, tout spéciale­ment de leur côté, prouve bien, ce qui se confirme, à savoir que c’est aussi de leur côté qu’on préfère ce que j’appellerai le côté « numéro » de cette exhibition. Ça ne facilite pas les rapports et c’est bien aussi de ce point de vue qu’il faut entendre le fait que j’ai cru, à plusieurs reprises dans mon dernier exposé, devoir faire allusion à ce qui constitue un certain temps de mes rapports avec les psychanalystes et, par exemple, quand j’ai parlé de l’accueil fait à ce que j’appelle la Chose freudienne ou tel ou tel autre point analogue.

Il ne s’agit pas là de ce que j’ai pu entendre qualifier de vains rappels d’un passé, ce qui est bien curieux pour des analystes puisqu’aussi bien, ce passé fait à proprement parler partie d’une histoire au titre de ce que j’ai essayé la dernière fois de préciser de ce qu’il en est pour nous de l’histoire, de ce que nous y apportons de contribution essentielle en montrant ce qu’il en est de la fracture, du traumatisme, de quelque chose qui se spécifie dans les temps du signifiant. Ce serait vraiment tout à fait méconnaître la fonction que je donne à la parole telle que je l’ai, la dernière fois, tout spécialement affirmée, si je ne tentais pas, de quelque façon, d’inclure dans ce que j’enseigne, ce que j’enregistre et consta­te des effets de la mienne et tout spécialement concernant ce qu’il en advient de ceux à qui elle s’adresse.

C’est pour cela que, dans toute la mesure où nous nous avançons cette année autour d’un point plus radical, il ne peut se faire que ceci n’aboutisse pas à mettre en relief quelque chose qui doit donner la clé du passage ou non de mon enseignement là où il doit porter. Il doit y avoir quelque rapport étroit entre ce que nous pourrons appeler ces failles, ces difficultés pour appeler les choses par leur nom et ce que précisément j’ai pu dire et avancer concernant le sujet pour autant qu’il se divise entre vérité et savoir.

La dernière fois je n’ai pas pourtant intitulé ce discours : « Courtois débat entre vérité et savoir ». J’ai parlé du sujet de la science et non pas du savoir. C’est bien là que gît quelque chose dont j’ai dit aussi qu’il y a quelque chose qui boite, autrement dit qui ne s’abouche pas d’une façon tout à fait adéquate ni aisée. C’est bien pour cela d’ailleurs que cette leçon, cet exposé a pour véritable titre, le sujet de la science, mais comme il doit être mis en vente, la loi d’un objet ven­dable c’est que l’étiquette couvre, ce que j’appellerai la marchandise et comme il s’agit de la science et de la vérité, à condition que vous mettiez le « et » dans la parenthèse qu’il mérite, à savoir que c’est un terme qui n’a pas du tout un sens univoque, qu’il peut aussi bien inclure la dissymétrie, l’oddité dont je parlais tout à l’heure, « la science et la vérité » sera le titre de cet exposé. Ou bien si vous voulez, «,la science, la vérité».

Ce qu’il y a dans cet exposé est aussi important par ce que cela laisse en blanc que par ce que cela contient. Dans l’énumération des diverses phases, des divers temps de la vérité comme cause, vous verrez que s’y sont produites les phases dites causes efficientes et causes finales. J’ai laissé dans le discret suspens de ce qui va alors être appelé débat entre psychanalyse et science, le jeu des rapports des causes matérielles et formelles. C’est de ceci que nous allons avoir aujour­d’hui à nous approcher. Dans ce qui s’obtient comme effet de ce que j’enseigne, dans la pratique de ceux qui le reçoivent, je puis constater une certaine tendance, un certain versant qui est celui, curieuse conséquence de la forme singulièrement stricte que je tente de donner au terme de sujet et qui aboutit à une singulière laxité, propre­ment celle qu’on pourrait qualifier au dehors et selon l’usage ordinaire de ces termes, de subjectivisme. C’est à savoir que chacun à tour de rôle, et aussi bien suivant je ne sais quel up-to-date de mode, – il peut être à la mode, par exemple, d’être un petit peu à la traîne sur la mode -, on en a usé comme repè­re dans la position qu’il prend dans l’activité analytique : successivement de l’être et de l’avoir, du désir et de la demande, – je ne les dis pas dans l’ordre où je les ai sortis – voire alors au dernier terme, le savoir et la vérité.

Voilà une des formes d’échappatoire, si je puis dire, – j’espère qu’elle n’est que mythique, approximative, je ne désigne et ne pointe là qu’une tendance. Voilà bien une des formes d’échappatoire les plus radicales à ce que je peux ten­ter d’obtenir, puisque, quel sens aurait-elle cette formulation que je donne de la fonction du sujet comme coupure, laissant peut-être une certaine indétermina­tion, dans son choix à l’origine, s’il ne s’agissait pas, fait absolument détermi­nant, précisément d’obtenir une certaine accommodation de la position de l’analyste à cette coupure fondamentale qui s’appelle le sujet. Ici seulement, comme identique à cette coupure, la position de l’analyste est rigoureuse. Bien sûr, elle n’est pas tenable. Ce n’est pas moi qui l’ai dit le premier, c’est Freud qui n’en doutait pas. C’est bien pour cela que pour tenir leur place, les analystes ne la tiennent pas.

A ceci, il n’y a pas à proprement parler à remédier mais il y a à le savoir, ce qui peut être une façon de le contourner. Ici se décèle la différence qu’il y a entre la Wirklichkeit à savoir la réalisation possible de mes relations avec les psycha­nalystes pour autant qu’ils me laissent à la place où je suis et où j’essaie d’insé­rer un certain type de formules, et la Realität qui est au-delà en tant que comme impossible, elle est ce qui détermine notre commun échec.

C’est en quoi tout échec n’est pas comme on l’a enseigné et comme on conti­nue à le croire, au niveau le plus rampant de la pensée analytique, tout échec n’est pas forcément un signe négatif. L’échec peut précisément être le signe de fracture où se marque le rapport le plus étroit avec la réalité.

Ceci motive et justifie, je vais le dire en deux mots, ce pourquoi, il me faut, la moitié de ces mercredis, les fermer. Qu’est-ce que ça veut dire? Et pourquoi ai­ je pris cette année le parti de faire moi-même le choix des personnes qui seront invitées à y participer? C’est pour cette raison très simple qu’au niveau de l’étu­de de cette Wirklichkeit il y a un côté dessiné d’échanges directs, un côté de balle passée de la parole qui ne peut se réaliser que dans certaines conditions de choix, de dosage entre les différents types de participants, ceux qui ont, de ma parole, à faire un usage analytique et ceux qui me démontrent qu’on peut très bien la suivre dans toute sa cohérence et sa rigueur. Comme de bien entendu, il faut s’y attendre, si la praxis analytique mérite ce nom de praxis elle s’insère dans une structure qui vaut, même au dehors de sa pratique actuelle.

Il faut donc que s’établisse une possibilité d’échanges à ce niveau de connais­sance commune, pour que puissent être étudiés ces termes qui faciliteraient l’usage de certains termes essentiels pour cette partie de notre praxis qui s’ap­pelle théorie et par exemple que quelque chose, je n’ai aucune idée préconçue, puisse être mis là, à l’ordre du jour. Par exemple, cela nous montre ce qu’ont pu déjà approcher de notre vérité les Stoïciens, qui se trouvent, d’une part nous apporter au niveau de la logique des références essentielles, qui ont cet intérêt pour nous d’être branche commune pour l’usage le plus moderne qui est fait de la logique et d’autre part, ce qui va apparaître dans mes leçons de cette année, et qui n’est pas une nouveauté pour l’analyste à ceci près que ce n’est point ainsi qu’il le formule avec ce qui est impliqué de corporel dans cette logique.

Car il ne suffit pas de se souvenir que nous parlons dans l’analyse d’image du corps. Image de quoi? Image flottante, baudruche, ballon qu’on attrape ou qu’on n’attrape pas. justement, l’image du corps ne fonctionne analytiquement que de façon partielle, c’est-à-dire impliquée, découpée dans la coupure logique. Alors cela peut-être intéressant de savoir que pour les Stoïciens, Dieu, l’âme humaine et aussi bien tout dans le monde, y compris les déterminations de qua­lité, tout, à part quelques points d’exception dont il ne sera pas sans intérêt de relever la carte, tout était corporel. Voilà des logiciens pour qui tout est corps. je ne vous dis pas que ce soit une étude à laquelle on ne pourrait pas en préfé­rer quelque autre meilleure, on pourrait aussi étudier pourquoi Aristote a tout à fait loupé la question de la cause matérielle. Pourquoi la matière, en fin de compte, chez lui, n’est pas cause du tout puisqu’elle est un élément purement passif. On peut prendre les choses où on veut. Si on a une praxis comme la nôtre, on doit toujours retomber sur les points vifs. Seulement ce choix ne peut se faire qu’en commun puisque c’est un choix très spécial et je ne peux pas lais­ser se répandre – ce qui ne manquerait pas d’arriver, avec le goût des étiquettes – que je vous prêche une psychanalyse stoïcienne.

Nous tâcherons donc de mettre au point ces choses d’un choix commun pour un travail efficace. je crois que le meilleur système est d’aboutir à un travail en sorte qu’il peut être communiqué à l’ensemble de ceux qui, ici, me feront l’hon­neur, je l’espère, de poursuivre leur assiduité aux deux premiers mercredis.

Ces remarques étant closes, qui d’ailleurs ne sont pas sans intérêt pour les points qui l’ont fait émerger dans mon discours, ce rappel de certaines questions sur la cause ou sur ce qu’il faut entendre par la matière,) e reprends encore ceci si mon enseignement a un sens et s’il est cohérent avec le structuralisme qu’il met en valeur, s’il a pu se poursuivre et s’édifier d’année en année, il me semble qu’il est assez normal de considérer qu’il a trouvé faveur dans ceci que la for­mulation structuraliste se fonde dans sa référence à un monde topologique.

Rappelez-vous, ceux qui le peuvent, mon premier graphe échafaudé pendant toute une année, patiemment, rappelez-vous ce premier graphe, ce rapport en réseau des fonctions déterminantes de la structure du langage et du champ de la parole. Si cette structure en réseau par exemple a un avantage, c’est précisé­ment d’appartenir à ce que j’appellerai au premier monde près, – mais je l’em­ploie vite pour me faire entendre – à un monde topologique, ce qui veut dire où les connections ne se perdent pas parce que le fond est déformable, souple, élastique. Ce n’est pas nouveau cela. Même les gens les plus rebelles ont très bien compris de quoi il s’agissait. De sorte que c’est ce qui permet que l’édifi­ce ne s’effondre pas, ne s’écroule pas, ne se déchire pas en raison des modifica­tions de proportion de la métrique de l’ensemble quand j’apporte de nouveaux termes.

Comme tout à l’heure je l’évoquais, après l’être et l’avoir, je parle du désir et de la demande. Il s’agit d’apercevoir où la structure les branche ces quatre termes l’un sur l’autre. Il ne me semble pas que ce soit, à proprement parler, impossible. Il y a là le rappel de quatre de ces réseaux structuraux : le trou, qui désigne ce dont je vais parler aujourd’hui, le graphe de deux étages et la fonc­tion de la parole pour autant que s’y différencie l’énonciation de l’énoncé.

Puis ici, quelque chose comme un lambeau carré, un champ où ceux, pas tel­lement rares, qui me lisent, encore que je n’en apprenne jamais rien, ont pu le relever au début d’un article qui s’appelle : « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose ». Il est vraiment très frappant que depuis le temps, il y a déjà quatre ans, que j’ai inscrit au tableau, pour mon auditoire psychanalytique précisément l’année de mon séminaire sur l’Identification, j’ai inscrit au tableau, vectorisé, le sché­ma topologique de ce qu’on appelle le plan projectif de ce que j’ai introduit sous le terme de cross-cap, à ce moment de mon enseignement, il est très frappant qu’il ne soit jamais venu à l’idée de personne de s’apercevoir que la bande de Moebius, en tant qu’elle est découpable dans ce plan projectif avec un reste, – nous dirons lequel – que la bande de Moebius est là inscrite qui vous attendait depuis longtemps, il faut le dire, mais enfin, on ne saurait reprocher à quiconque ne l’avoir pas deviné. Néanmoins les lettres que j’avais inscrites : M i m 1, ce n’est pas uniquement pour le plaisir de faire mimi que je les ai mises là. Elles pouvaient peut-être faire soupçonner quelque chose, à savoir cette fonction d’application que je donne à la bande de Moebius pour vous faire saisir ce qu’il en est de la coupure constituante de la fonction du sujet.

Il y a, tout en bas, je vous signale en passant, pour ceux à qui cela chantera de le relever aujourd’hui, un nouveau petit graphe que je vous donne comme objet de réflexion qui est à proprement parler utile pour saisir les rapports de ce que j’ai appelé et continue de faire fonctionner comme le signifiant avec ce qui nous sera tout spécialement utile de considérer cette année : le fonctionnement du signifiant dans ce qui est non pas seulement le langage, dont je vous ai dit la dernière fois qu’il n’y a pas de métalangage, mais aussi ce qui implique, ce qui se présente comme tel, la logique. Qu’est-ce que la logique ? Sinon justement une tentative de métalangage ? La logique n’est qu’une chute et elle ne se conçoit et se prend qu’à la considérer comme telle. C’est pour­quoi dans ce schéma d’en bas, vous avez à la pointe de droite, quelque chose que j’ai écrit phone, ou phonème, l’élément proprement phonématique du signifiant. Il est formé par quelque chose qui apparaît aux deux pôles supé­rieur et inférieur comme symbole indicatif que je puis avancer maintenant puisque l’année dernière, j’ai pu vous montrer ce qu’il en est, de sa fonction centrale, de cette fonction d’indication. Le type en est le shifter. Ce qui est essentiellement indiqué, c’est toujours plus ou moins le trou du sujet, du sujet de l’énonciation.

Au pôle inférieur, le symbole, – mais peut-être le terme va-t-il vous sur­prendre, et c’est précisément que je ne peux l’introduire dans toute sa crudité qu’en ce point de l’élaboration, parce qu’alors, il ne domine pas tout, il n’em­porte pas tout – le symbole imitatif. Voilà ce qui concourt dans le phonème et le phonème vous renvoie au pôle de la combinaison logique qui est à saisir au bout de la ligne horizontale sur la droite.

La relation de ce résultat logique avec les index et les termes lexicaux dont je puis, à partir de là, fort bien admettre qu’ils admettent des éléments d’imitation. Leur relation c’est toute l’affaire de la logique en tant qu’une logique est consti­tutive de la science. Cela ne change rien au fait qu’il n’y a pas de métalangage. Le petit schéma d’en haut est pour vous rappeler qu’à l’entrée d’un article qui s’appelle La lettre volée, vous avez un certain nombre de concaténations concernant la chaîne signifiante qui peut-être s’éclaireront un peu plus, mais dont je ne peux pas dire que, jusqu’à présent, elles aient eu une grande vertu d’illumination, qui s’éclaireront un petit peu plus de ce dans quoi nous allons nous avancer tout à l’heure.

Et alors ? Il s’agit de partir du sujet, du sujet de la science tel que nous avons cru pouvoir le pointer en cette expérience de Descartes, signe d’un point d’éva­nouissement, mais aussi bien dans l’effort logique de Frege par où il nous désigne où le un doit surgir si nous voulons en donner le fondement purement logique, c’est-à-dire proprement au niveau de l’objet zéro.

Ces deux rappels de l’année dernière ne suffisent-ils pas à rendre étonnant et significatif de l’écoute que je rencontre que tel, et des meilleurs, se soit montré lui-même surpris de l’accent que j’ai mis, lors de mon dernier exposé, sur le sujet de la science? Ce ne sont pas là remarques vaines à étudier ce qu’il en est de cer­taine surdité, momentanée d’ailleurs, justement parce que freudiens, nous ne nous satisfaisons absolument pas du terme de scotomisation, à savoir que pour nous, le trou, et pour les meilleures raisons, ne peut pas être dans la perception, c’est à proprement parler une connerie sur laquelle, d’ailleurs, on a édifié beau­coup.

Toute la psychiatrie anglaise, pendant plusieurs années, n’a parlé que d’hallu­cinations négatives. C’est autrement structuré et il suffit pour cela de lire l’ar­ticle « Fetichismus » que Freud a fait tout expressément pour montrer en quoi consiste la Spaltung, la division de la réalité elle-même dans le sujet dit pervers à l’occasion. C’est bien pour cela qu’il est intéressant de pointer de telles remarques, de tels accidents en tant que j’ai le bonheur, après tout ce qui ne paraissait pas un bonheur à mon cher et défunt ami, Maurice Merleau-Ponty, de recueillir l’après-midi même du jour où j’avais à Sainte-Anne alors à m’expri­mer, les désarrois divers de mes propres auditeurs. J’y vois, quant à moi, au contraire, pour eux comme pour moi, beaucoup d’avantages.

Alors, repartons maintenant du trou. Le trou, il y a longtemps, très long­temps que je lui donne, quant au fonctionnement d’ordre symbolique, la fonc­tion essentielle. Ai-je besoin de rappeler un certain meeting, congrès, attroupe­ment, comme vous voudrez qui se passait à Royaumont et où, ayant fait un rap­port sur La direction de la cure et tout ce qui s’ensuit, les principes de son pou­voir, je ne leur ai parlé, parce qu’il fallait bien changer de disque puisque le dis­cours était déjà imprimé, je ne leur ai parlé, à la stupéfaction d’un journaliste qui est entré là on ne sait pas par quelle porte, je ne leur ai parlé que du pot de mou­tarde en partant de ce fait d’expérience qui s’était une fois de plus confirmé au déjeuner, que le pot de moutarde est toujours vide. Il n’y a pas d’exemple qu’on ouvre un pot de moutarde et qu’on trouve de la moutarde dedans. Ce pot de moutarde, c’est la création symbolique par excellence et tout le monde le sait depuis longtemps. S’il n’y avait pas d’être qui parle, il y aurait peut-être des creux dans le monde, des flaques, des dépressions, des choses qui retiennent, il n’y aurait pas de vase.

On aurait tort de croire que ce soit pour rien que cela fasse partie pour nous des premiers et essentiels reliefs à retrouver de la civilisation. Les céramiques, puis les vases en bronze, la quantité prodigieuse de ces choses que nous trouvons et qu’il nous reste, cela devrait quand même un peu nous tirer l’oreille, et bien d’autres choses encore. Enfin, il ne suffit pas de tirer l’oreille pour le faire entendre, il faut croire. Évidemment, il y avait d’autres choses avant. Les pre­miers gisements historiques, cela porte un joli nom en danois mais je suis inca­pable de le prononcer, ce sont des amas de détritus, alors, là nous avons l’objet a.

Et le vase n’est pas un objet a. Cela a servi depuis très longtemps à exprimer quelque chose. Quoi? Est-ce que c’est une leçon de théologie? Vous savez, Dieu, le grand ouvrier : « De même nous dit-on au catéchisme, qu’il faut un potier pour faire un pot, de même… ». Que n’en avons-nous mieux profité! Car cela ne dit pas du tout ce dont ça cherche à nous convaincre. Cela nous dit quoi ? «Deus creavit mundum ex nihilo ». Qu’est-ce que ça veut dire? Cela veut dire que le vase, il le fait autour du trou. Que ce qui est essentiel, c’est le trou. Et parce que c’est essentiel que ce soit le trou, l’énoncé juif que Dieu a fait le monde de rien est à proprement parler, Koyré le pensait, l’enseignait et l’a écrit, ce qui a frayé la voie de l’objet de la science.

On est empêtré, on reste collé à toutes les qualités quelles qu’elles soient, depuis la force, l’impulsion, la couleur, tout ce que vous voudrez, à la percep­tion, bref au morceau de craie auquel la progéniture socratique reste collée, comme les mouches sur le papier à mouche depuis deux mille ans. Lagneau et aussi bien Alain, là, ont spéculé sur l’apparence. Alors cette apparence ? Eh bien, il faut que nous arrivions à voir comment elle est aussi la réalité. C’est avec cela que la philosophie et la science, l’une par rapport à l’autre, ont pris une solide tangente. Alors ? Je pense être en mesure de vous le dire tout de suite. Le bout de craie devient objet de science à partir du moment et dès le moment où vous partez de ce point qui consiste à le considérer comme manquant. C’est ce que je vais essayer de vous faire sentir tout de suite.

Mais dès maintenant, je ne veux pas perdre l’occasion d’agrafer au passage ce que signifie la cause matérielle parce que si vous êtes philosophes, je vous dirai que la matière, c’est la moutarde, c’est-à-dire ce qui remplit le vide. Aristote qui était pourtant si bien orienté dans sa conception de l’espace, est fort loin de cette étendue terriblement glissante qui est un véritable problème à toujours reposer dans notre progrès dans les sciences mathématico-physiques. Il avait très bien vu que le lieu était ce qui permettait de donner de l’espace une conception qui ne s’étendrait pas indéfiniment, qui ne nous mettrait pas à la question de ce faux infini. Seulement voilà, après être si bien parti que d’avoir défini le lieu comme le dernier contenant, le dernier étant celui qui est non mu, eh bien voilà, parce qu’il était grec et qu’il n’avait pas lu la Bible, il n’a pas pu admettre qu’il y ait un vide séparé des objets. Alors, il a rempli le pot de moutarde et c’est à cause de cela qu’on y est resté pendant un certain nombre de siècles.

Est-ce à dire que la cause matérielle c’est le pot, création incontestablement divine comme toute création de la parole et à quoi se réduit strictement ce qui est dit dans le texte de la Genèse ? Mais non. Et c’est là la remarque que je vou­drais pointer en passant. Des pots, nous en trouverons des tas, je vous l’ai dit tout à l’heure et dans les tombes, partout où règnent ce que l’on appelle les cul­tures primitives. A des desseins tout à fait précis, à savoir que les collectionneurs futurs ne puissent pas les donner comme pot de fleurs à leur petite amie, moyennant quoi, depuis longtemps tous les pots seraient détruits, à seule fin que ces pots se conservent, les gens qui les déposent dans les sépultures font un trou au centre. Ce qui vous prouve que c’est bien du côté du trou qu’il vous faut chercher la cause matérielle. Voilà quelque chose qui cause quelque chose, un trou dans le vase. Voilà le modèle.

Si vous prenez le sommet de l’élaboration scientifique qui en est, en même temps la clé de voûte et la cheville essentielle, vous obtenez quoi ? Vous obtenez ce qu’on appelle l’énergétique. L’énergétique n’est pas ce que croit un auteur qui l’oppose, comme un complément, à ma théorie structurale de la psychanalyse. Il s’imagine que l’énergétique, sans doute, c’est ce qui pousse. Voilà la culture chez les philosophes!

L’énergétique, si vous vous rapportez par exemple à quelqu’un d’aussi auto­risé quand même que Feynman, dont je n’ai pas attendu qu’il ait le prix Nobel, je vous prie de le croire, pour l’ouvrir, dans un traité en deux volumes qui s’ap­pelle Lectures on physics et qui, pour ceux qui ont le temps, enfin, je ne saurais leur recommander une meilleure lecture car c’est un cours en deux ans, absolu­ment exhaustif. Il est tout à fait possible de couvrir tout le champ de la physique à son niveau le plus élevé en un certain nombre de leçons qui, finalement, ne pèsent pas plus qu’un kilogramme et demi.

Dans le troisième chapitre ou le quatrième, je ne sais pas, il met le lecteur ou l’auditeur, je ne sais pas, au parfum de ce que c’est que l’énergétique. Ce n’est pas moi, donc, qui ai inventé cela pour servir mes thèses. Je me suis souvenu que j’avais lu ça quand j’ai eu le volume, c’est-à-dire il y a un an et demi. Prière de consulter le premier paragraphe du chapitre IV : « Conservation of energy ».

Qu’est-ce qu’il trouve de mieux pour en donner l’idée à des auditeurs sup­posés relativement vierges de ce qu’il en est de la physique puisque, jusque-là, ils n’auront eu d’enseignement que d’incompétents ? Il suppose un petit morveux qu’il appelle Denis the menace, Denis le danger public. On lui donne vingt-huit petits blocs mais comme c’est une brute, ils sont en platine, indes­tructibles, insécables, indéformables. Il s’agit de savoir ce que va faire la maman chaque fois que, discrète comme il convient, c’est-à-dire pas maman américai­ne, elle rentre dans la chambre du bébé et que tantôt elle ne trouve que vingt ­trois blocs, tantôt vingt-deux. Il est clair que ces blocs se retrouveront toujours, soit sur le sol du jardin parce qu’ils auront passé par la fenêtre, soit dans une dif­férence de poids qu’on pourra constater d’une boîte que bien entendu, on n’ou­vrira pas; soit parce que l’eau de la baignoire aura légèrement monté mais comme l’eau de la baignoire est trop sale pour qu’on voit le fond, c’est par cette légère élévation de niveau qu’on saura où sont passé les blocs. Je ne vous lis pas tout le passage. Le temps me manque. Il est sublime.

L’auteur pointe qu’on retrouvera toujours le même nombre constant de blocs à l’aide d’une série d’opérations qui consisteront à additionner un certain nombre d’éléments par exemple la hauteur de l’eau divisée par la largeur de la baignoire, à additionner cette division curieuse à quelque chose d’autre qui sera, par exemple, le nombre total de blocs restants. Vous suivez, j’espère. Personne ne grimace. C’est-à-dire à faire cette chose qui, je vous le dis en passant, est incluse dans la moindre formule scientifique, qui est que non seulement on additionne mais qu’on soustrait, qu’on divise, qu’on opère de toutes les façons avec quoi? Avec des nombres grâce à quoi on additionne, faute de quoi il n’y aurait pas de science possible, on additionne communément des torchons avec des serviettes, des poires avec des poireaux, n’est-ce pas ?

Or qu’est-ce que qu’on apprend aux enfants quand ils commencent à entrer, – j’espère qu’il n’en est plus ainsi maintenant mais je ne suis pas rassuré – jus­tement pour leur expliquer des choses, on leur dit le contraire, à savoir qu’on n’additionne pas les torchons avec les serviettes, ni les poires avec les poireaux moyennant quoi, naturellement, ils sont définitivement barrés aux mathéma­tiques.

Revenons à notre Feynman. Cette parenthèse ne peut que vous égarer. Feynman conclut :

« Voilà l’exemple. Un chiffre va toujours sortir constant : vingt-huit blocs. L’énergétique, dit-il, c’est cela. Seulement, il n’y a pas de bloc. »

Ceci veut dire que le chiffre constant qui assure le principe fondamental de la conservation de l’énergie, – je dis non seulement fondamental mais dont le seul frémissement à la base suffit à mettre tout physicien dans la panique absolue, ce principe doit être conservé à tout prix, donc il le sera forcément puisqu’il le sera à tout prix, c’est la condition même de la pensée scientifique.

Mais qu’est-ce que cela veut dire la constante, c’est-à-dire qu’on retrouve toujours le même chiffre? Car tout est là. Il ne s’agit que d’un chiffre. Cela veut dire que quelque chose qui est manque, comme tel, – il n’y a pas de bloc – est à retrouver ailleurs, dans un autre mode de manque. L’objet scientifique est pas­sage, réponse, métabolisme (métonymie si vous voulez mais attention) de l’ob­jet comme manque. Et à partir de là, beaucoup de choses s’éclairent. Nous nous reporterons à ce que l’année dernière, nous avons pu mettre en évidence de la fonction du Un.

Est-ce qu’il ne vous apparaît pas que le premier surgissement du Un concer­nant l’objet, c’est celui de l’homme des cavernes, – pour vous faire plaisir, si vous vous plaisez encore à ces sortes d’images, – qui rentre chez lui où il y a un petit peu de provision ou beaucoup, pourquoi pas, et qui dit: « il en manque un ». C’est cela l’origine du trait unaire : un trou. Bien sûr, on peut pousser les choses un peu plus loin et même, nous n’y manquerons pas. Remarquez que ceci prouve que notre homme des cavernes est déjà au dernier point des mathé­matiques. Il connaît la théorie des ensembles. Il connote : il en manque un. Et sa collection est déjà faite. Le véritable point intéressant, c’est évidemment le Un qui dénote. Là, il faut le référent. Et les Stoïciens nous serviront.

Il est évident que la dénotation, là, est quoi ? Sa parole c’est-à-dire la vérité qui nous ouvre, elle, sur le trou, à savoir : pourquoi Un? Car cet Un, ce qu’il désigne, c’est toujours l’objet comme manquant. Et où serait donc la fécondité de ce qu’on nous dit être caractéristique de l’objet de la science à savoir qu’il peut toujours être quantifié? Est-ce que c’est seulement, que par un parti pris qui serait véritablement incroyable, nous choisissons de toutes les qualités de l’objet, seulement celle-ci : la grandeur, à quoi ensuite nous appliquerions la mesure dont on se demande, dès lors, d’où elle nous vient? Du ciel, bien enten­du. Chacun sait que le nombre, c’était tout du moins ainsi que Kronecker s’ex­primait, si mon souvenir est bon :

« le nombre entier est un cadeau de Dieu. »

Les mathématiciens peuvent se permettre des opinions aussi humoristiques. Mais la question n’est pas là. C’est justement de rester collé à cette notion – que la quantité c’est une propriété de l’objet et qu’on la mesure -, qu’on perd le fil, qu’on perd le secret de ce qui constitue l’objet scientifique. Ce qui se mesure à l’aune de quelque chose qui est toujours quelque chose d’autre, dans les dimensions, et elles peuvent être multiples, de l’objet comme manque.

Et la chose est si peu simple que, ce dont nous aurons à nous apercevoir, c’est que la véritable expérience qu’on fait, dans l’occasion, est celle-ci, à savoir que le nombre en soi, n’est pas du tout un appareil de mesure et la preuve en a été donnée au lendemain même des inspirations pythagoriciennes; on a vu que le nombre ne pouvait pas mesurer ce qu’il permet lui-même de construire, à savoir qu’il n’est même pas foutu de donner un nombre, un nombre qui d’aucune façon s’exprime d’une façon commensurable, de la diagonale du carré qui n’existerait pas sans le nombre.

Je n’évoque ceci ici que par ce que cela a d’intéressant : si le nombre pour nous est à concevoir comme fonction du manque, cette simple remarque que j’ai faite à propos de la diagonale incommensurable nous indique quelle richesse nous est offerte à partir de là.

Car, le nombre nous fournit, si je puis dire, plusieurs registres de manque. Je précise, pour ceux qui ne se sont pas spécialement intéressés à cette question un nombre dit irrationnel, qui est pourtant, au moins depuis Dedekind, à consi­dérer comme un nombre réel, n’est pas un nombre qui consiste en quelque chose qui peut s’approcher indéfiniment. Il n’est plongeable dans la série des nombres réels, précisément, qu’à faire intervenir une fonction dont ce n’est pas par hasard qu’on l’a appelée la coupure. Cela n’a rien à faire avec un but qui se recule comme quand vous écrivez 0,333333 qui est un nombre, lui, parfaitement commensurable. C’est un tiers de un. Pour la diagonale, on sait depuis les Grecs pourquoi elle est strictement incommensurable à savoir que pas un de ses chiffres n’est prévisible jusqu’à la fin des fins.

Ceci n’a d’intérêt que de vous faire envisager que peut-être les nombres nous fourniront quelque chose de très utile pour essayer de structurer ce dont il s’agit pour nous, à savoir la fonction du manque. Nous voici donc devant la position suivante: le sujet ne peut fonctionner qu’à être défini comme une coupure, l’ob­jet comme un manque. Je parle de l’objet de la science, autrement dit, un trou, les choses allant si loin que je pense vous avoir fait sentir que seul le trou, en fin de compte, peut passer pour ceci qui, effectivement nous importe, c’est-à-dire la fonction de cause matérielle. Voici les termes entre lesquels nous avons à ser­rer un certain nœud.

Puisque, je n’ai pu aujourd’hui avancer mon propos aussi loin que je l’espé­rais en conséquence du fait que les choses n’étaient point écrites et puisqu’aus­si bien, je ne peux pas espérer en huit jours, faire à ma discrétion le choix néces­saire, je ferai, ce troisième mercredi de ce mois par exception, le même séminai­re ouvert où vous êtes donc tous conviés.

Pour ponctuer, pointer ce dont il va s’agir je ferai l’opposition suivante : quel rapport concevoir de l’objet a dans la psychanalyse avec cet objet de la science tel que je viens d’essayer de vous le présentifier? Il ne suffit pas de parler du trou, alors que pourtant bien sûr il me semble au moins pour les plus vifs, que la solution doit déjà vous apparaître pointée, c’est le cas de le dire, à notre horizon. La fonction du manque, – je n’ai pas dit l’idée, faites attention, cette idée, nous savons comment elle a attrapée Platon par la cheville et qu’il ne s’en est point dépêtré – la fonction du manque, nous la voyons surgir, subir la fuite nécessaire par la chute de l’objet a et c’est ce que ces dessins que j’ai amenés aujourd’hui, que je ramènerai la prochaine fois, sont faits pour vous faire tou­cher du doigt.

Quelle structure est nécessaire pour qu’une coupure détermine le champ, d’une part du sujet tel qu’il est nécessité comme sujet de la science et d’autre part le trou où s’origine un certain mode d’objet, le seul à retenir, celui qui s’ap­pelle objet de la science, et qui comme tel, peut être cette sorte de cause sur laquelle j’ai laissé la dernière fois le point d’interrogation, et qui est tel qu’il apparaît seulement sous la forme des lois ? Ou bien où s’accroche-t-elle cette face, manifestement matérialiste par laquelle peut être justement désignée la science ? C’est bien en ce nœud de la fonction du manque que gît et qu’est recé­lé ici le point tournant de ce qui est en question. Et qu’allons-nous avoir en ce point qui est un point de béance? Nous l’avons vu l’année dernière à propos de la genèse fregeienne du nombre un. C’est pour sauver la vérité qu’il faut que cela fonctionne. Sauver la vérité, ce qui veut dire, ne rien vouloir en savoir.

Il y a une autre position qui est de jouir de la vérité. Cela c’est la pulsion épis­témologique. Le savoir comme jouissance avec l’opacité qu’il entraîne dans l’abord scientifique de l’objet, voilà l’autre terme de l’antinomie. C’est entre ces deux termes que nous avons à saisir ce qu’il en est du sujet de la science. C’est là que je compte le reprendre pour vous emmener plus loin. Entendez bien, pour parler de cette fonction radicale, je n’ai rien fait encore surgir de ce qu’il en est de l’objet a mais vous devez bien sentir que le même schéma, justement, que je n’ai pas là reproduit, le schéma des deux cercles au temps où je vous ai dépeint la fonction de l’aliénation comme telle, rappelez-vous l’exemple : «la bourse ou la vie ? », « la liberté ou la mort ? ». je vous ai expliqué le schéma de l’aliénation: est-ce là un choix qui n’en est pas un en ce sens qu’on y perd tou­jours quelque chose ? Ou bien le tout, vous jouissez de la vérité mais qui jouit puisque vous n’en savez rien? Ou bien vous avez, non pas le savoir mais la science et cet objet d’intersection qui est l’objet a vous échappe. Là est le trou. Vous avez ce savoir amputé. Tel est le point sur lequel je m’arrêterai aujour­d’hui.

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