samedi, juillet 27, 2024
Recherches Lacan

LXXII R.S.I. 1974 – 1975 Leçon du 13 mai 1975

Leçon du 13 mai 1975

 

Il n’y a pas, il n’y a pas d’états d’âme. Il y a à dire, à démontrer. Et pour promouvoir le titre sous lequel ce dire se poursuivra l’année prochaine (si je survis), je l’annoncerai : 4, 5, 6.

Cette année, j’ai dit R.S.I. Pourquoi pas 1, 2, 3 ? – « Un, deux, trois, nous irons aux bois.» – Vous savez la suite peut-être? – « Quatre, cinq, six, cueillir des cerises. » – Oui – « Sept, huit, neuf, dans mon panier neuf. » – Eh bien, je m’arrêterai à 4, 5, 6. Pourquoi ?

Pourquoi R.S.I. se sont-ils donnés comme lettres ? C’est que qu’elles soient trois peut être dit second. Ce n’est que parce qu’elles sont trois qu’il y en a un qui est le Réel. Lequel, laquelle de ces trois lettres mérite-t-elle ce titre de Réel ? je dis qu’à ce niveau de logique, peu importe! et que le sens le cède au nombre, au point que c’est le nombre qui, ce sens, vais-je dire le domine? Non pas! Le détermine. Le nombre trois est à démontrer comme ce qu’il est s’il est le Réel, à savoir l’Impossible. C’est la plus difficile sorte de démonstration. Ce qu’on veut démontrer en passe du dire, il faut que ce soit impossible, condition exigible pour le Réel. Il ek-siste comme impossible.

Encore faut-il le démontrer, pas seulement le montrer! Le démontrer relève du Symbolique. Si le Symbolique prend le pas ainsi sur l’Imaginaire, ça ne suffit pas, ça ne donne que le ton. Et en fin de compte, ce n’est pas au ton qu’il faut se fier puisque c’est au nombre. C’est ce que j’essaie de mettre à l’épreuve. Mais un nombre noué, est-ce encore un nombre? Ou bien est-ce autre chose

Voilà où nous en sommes. je vous ai retenus tout le long de l’année autour d’un certain nombre de flashs. je n’y suis, moi, que pour peu de choses, étant déterminé comme sujet par l’inconscient, ou bien, par la pratique, une pratique qui implique l’inconscient comme supposé. Est ce à dire, que comme tout supposé, il soit imaginaire ? C’est le sens même du mot « sujet » : supposé comme imaginaire.

Qu’y a-t-il dans le Symbolique qui ne s’imagine pas ? Ce que je veux vous dire c’est qu’il y a le trou. Quelqu’un qui me voyait en proie, c’est le cas de le dire, à ce nœud, que là [figure XI-il je vous dessine sous sa forme la plus simple, quelqu’un qui m’y voyait en proie, sous des formes plus compliquées, m’a dit que je me démentais en quelque sorte d’avoir avancé dans un temps, (selon une forme qui n’est même pas mienne, qui est picassienne comme chacun sait) « je ne cherche pas, je trouve », quelqu’un m’a dit : «Eh ben ! là! je vous vois vachement chercher ».

Chercher, c’est un terme qui provient de circare, comme vous pouvez le trouver dans n’importe quel dictionnaire étymologique. je trouve quand même, puisque ça, ça n’est pas dans le dictionnaire étymologique, j’ai trouvé le trou, le trou de Soury, si j’ose m’exprimer ainsi, par où j’en suis réduit à passer. A-t-il affaire avec ce qu’on imagine le déterminer, à savoir le cercle? Un cercle peut être un trou, mais il ne l’est pas toujours… Pendant que j’y suis, à ce sujet, je dirai, – je rappellerai ce qui se trouve déjà dans les dernières lignes de mes Propos sur la causalité psychique – un proverbe arabe qui énonce qu’il y a un certain nombre de choses, il en nomme trois lui aussi, sur quoi rien ne laisse de trace l’homme dans la femme dit-il d’abord, voire le pas de la gazelle sur le rocher. je le précède, évoquant ce troisième terme de ceci terminé par une virgule «plus inaccessible à nos yeux, cette trace, faite pour les signes du changeur. » C’est le troisième terme. Il n’y à pas de trace sur la pièce de monnaie touchée, seulement d’usure.

Oui! C’est bien là où vient se solder, c’est le cas de le dire, ce quelque chose de noué dont il s’agit, je trouve, assez pour avoir à fomenter le cercle qui n’est du trou que la conséquence, je trouve, assez pour avoir à circuler. je ne sais pas si vous remarquez que la police dont Hegel pose fort bien que tout ce qui est de la politique s’y enracine et qu’il n’y a rien de la politique, qui ne soit enfin au dernier terme de réduction, police pure et simple, que la police n’a que ce mot à la bouche : « Circulez! ». Peu lui importe la gyrie dont je vous ai parlé la dernière fois, que ce soit de gyrer à droite ou à gauche, elle s’en fout, c’est le cas de le dire, ce dont il s’agit, c’est de circuler! Ça devient, ça ne devient sérieux que si l’on part du trou par où il faut en passer. Ce qu’il y a de remarquable dans le nœud dit bo, je ne dis pas beau, dans le nœud bo, comme je l’appellerai à l’occasion, c’est exactement ceci qu’il fasse nœud, tout en ne circulant pas d’une façon qui utilise ce trou comme tel. Il y a une différence entre ce nœud et ceci [figure XI-2] qui, le trou, utilise. C’est ce qui fait chaîne.

Il est frappant depuis le temps qu’on fait des chaînes que la chose qu’on n’ait pas remarquée, c’est que dans le nœud bo, pas besoin d’user du trou puisque ça fait nœud sans faire chaîne. Ça fait nœud de quelle façon? D’une façon telle que (pour le refaire de la façon qui fait des ronds [figure XI-3], ce qui est exactement la même chose que ça [figure XI-4], malgré l’apparence comme vous le voyez sous cette forme, cette forme de pure apparence, c’est dans la mesure où ces deux ronds ne sont pas noués [figure XI-4] que le troisième, dans cette mesure même, infléchit l’un des deux qui entre eux sont libres, l’infléchit de telle façon que nécessairement arrivé à l’autre bout d’un de ces cercles, il infléchira l’autre à son tour, et ainsi, qu’il tournera en rond, si ce rond, le petit là, nous le supposons du Symbolique, il fera indéfiniment le tour de la – entre guillemets puisque ce n’est pas une vraie chaîne – de la « fausse chaîne» de l’Imaginaire et du Symbolique. C’est bien en effet de cela qu’il s’agit.

Comment se reconnaître dans ce double cercle couplé et justement, de n’être pas noué ? Pour qu’un nœud soit borroméen, qu’un nœud soit bo, il ne suffit pas qu’il soit nœud, il faut que chacun des éléments ce terme, « il faut et il suffit », on lie lui donne pas, sauf à se référer au nœud, son plein sens : dire « il faut », c’est quelque chose, mais dire « il suffit» implique, ce qu’on oublie toujours parce qu’on ne fait pas le trou, le seul trou qui vaille, la trouvaille ! parce qu’on ne fait pas le trou, on ne voit pas que si la condition manque, rien ne va plus! Ce qui est l’envers du « il faut », envers toujours éludé. Je vais vous le démontrer tout de suite.

Vous nouez deux cercles [figure XI-5], vous les nouez d’une façon qui implique, comme c’est là non démontré mais bien seulement montré vous les nouez d’une façon telle qu’ils ne soient pas noués; qu’ils fassent ici quelque chose qui est aussi bien la consistance d’un cercle que d’une droite infinie, cela suffit car c’est identifiable à cette figure [figure XI-1], nœud bo, cela suffit à faire un nœud borroméen. Rien ne va vous être plus facile à imaginer que ceci : c’est que si vous en faites passer ici comme ça une autre, vous avez une figure qui aura l’air – comment ne pas le croire ? – d’être un nœud borroméen. Néanmoins il ne suffit pas de couper cette consistance pour que chacun des trois autres éléments soient libres des deux autres. Pour qu’il en soit ainsi, il faudrait que les choses se disposent autrement, – qui pourtant a bien l’air d’être la même chose – à savoir [figure XI-6] que la disposition à quatre éléments soit de cette forme, en tant que montrable. Qu’est-ce qui le démontre ? Car dans cette forme, il est clair que l’un quelconque des éléments étant rompu, les trois autres sont libres : ce qui n’était pas le cas dans la première figure que je vous ai livrée.

Et d’abord qu’est-ce qu’il y a de commun dans la façon dont je vous figure ces quatre éléments, qu’est-ce qu’il y a de commun entre la droite comme infinie et le cercle? Ce qu’il y a de commun, c’est que leur rupture libère les autres éléments du nœud. La rupture du cercle équivaut à la rupture de la droite infinie. En quoi ? Au point de vue du nœud – non pas en tant que rupture dans ses effets sur le nœud, non pas dans ses effets de reste sur l’élément. Que reste-t-il du cercle après sa rupture ? Une droite finie comme telle, autant dire bonne à jeter, un petit chiffon, un bout de corde de rien du tout. Le zéro du cercle coupé! Laissez-moi figurer ce coupé par ce qui sépare c’est-à-dire le deux, zéro sur deux égale tout au plus ce petit un de rien du tout. La droite infinie, le grand Un, une fois sectionnée, ça fait quand même deux demi-droites qui partent comme on dit, d’un point, d’un point zéro, pour s’en aller à l’infini. Un sur deux égale deux. Ceci pour vous faire sentir que quand j’énonce qu’il n’y a pas de rapport sexuel, je donne au sens du mot « rapport » l’idée de proportion. Mais chacun sait que le ?nos geometricum d’Euclide, qui a suffi pendant tant de temps à paraître le parangon de la logique, est tout à fait insuffisant et qu’à entrer dans la figure du nœud, il y a une tout autre façon de supporter la figure du non-rapport des sexes : c’est de les supporter de deux cercles en tant que non noues. C’est de cela qu’il s’agit dans ce que j’énonce du non-rapport, chacun des cercles qui se constituent, nous ne savons pas encore de quoi, dans le rapport des sexes, chacun dans sa façon de tourner en rond comme sexe n’est pas, à l’autre, noué. C’est cela que ça veut dire, mon non-rapport.

Il est tout à fait frappant que le langage ait depuis longtemps devancé la figure du nœud (sur laquelle s’escriment, seulement de nos jours, les mathématiciens) pour appeler « nœud » ce qui unit l’homme et une femme, sans bien naturellement savoir ce dont il s’agit, en parlant métaphoriquement des nœuds qui les unissent. Ce sont ces nœuds qu’il vaut sans doute de rapporter en montrant qu’ils impliquent comme nécessaire ce 3 élémentaire dont il se trouve que je les supporte de ces trois indications de sens, de sens matérialisé, qui se figurent dans les nominations du Symbolique, de l’Imaginaire et du Réel.

Je viens d’introduire le terme de « nomination ». J’ai eu a y répondre récemment a propos de ce qui était rassemblé dans un petit ouvrage de logiciens sur le sujet de ce que les logiciens étaient parvenus à énoncer jusqu’à ce jour, concernant ce qu’on appelle le « référent ». Je tombais là du haut de mon nœud, et ça ne m’a pas du tout facilité les choses parce que c’est là toute la question : la nomination relève-t-elle comme il semble apparemment, du Symbolique? Vous le savez, enfin peut-être vous en souvenez-vous! Je vous ai fait un jour la figure qui s’impose quand on veut fomenter un nœud à quatre. Le moins qu’on puisse dire, c’est que si nous introduisons à ce niveau la nomination, c’est un quart élément. Cette figure, je vous l’ai faite de cette façon-ci [figure XI-7] : il faut partir de cercles non noués, et même je n’ai pas de répugnance à évoquer le cas où j’ai fait défaut à cette figure. Voilà ce qui convient pour qu’un quart cercle noue les trois qui d’abord étaient posés, comme dénoués. Cette figure, contrairement à celle d’un jour où j’étais aussi bien embrouillé que vous pouvez l’être à l’occasion, faute de vous être rompus à cet exercice, l’un des cercles restait hors du jeu.

C’est en ceci que si plein dans sa simplicité que soit le nœud borroméen à trois, c’est à partir de quatre, et je souligne, à s’engager dans ce quatre, on trouve une voie, une voie particulière qui ne va que jusqu’à six. En d’autres termes, qui fait du cercle couplé, pris pour chacun des éléments qualifiables de ce que le trois impose, non pas de distinction, mais bien au contraire d’identité entre les trois termes du Symbolique, de l’Imaginaire et du Réel au point qu’il nous semble exigible de retrouver dans chacun, cette triplice, cette trinité du Symbolique, de l’Imaginaire et du Réel. A savoir d’évoquer que le Réel tient dans ces termes que j’ai déjà fomentés du nom d’ek-sistence, de consistance et de trou, de faire de l’ek-sistence écrite comme je l’écris, à savoir ce qui joue jusqu’à une certaine limite dans le nœud, cela supporte le Réel. Ce qui fait consistance est de l’ordre Imaginaire comme le suppose ceci qui nous est vraiment tangible que s’il y a quelque chose de quoi relève la rupture, c’est bien la consistance, à lui donner le sens le plus réduit. Il reste alors, (mais reste-t-il ?) pour le Symbolique l’affectation du terme « trou », ceci en tant que la mathématique, celle proprement qui se qualifie de la topologie, nous donne une figure sous la forme du tore de quelque chose qui pourrait figurer le trou. Or la topologie ne fait rien de tel, ne serait-ce que parce que le tore en à deux, trous : le trou interne avec sa gyrie et le trou qu’on peut dire être externe, et grâce à quoi le tore se démontre participer de la figure du cylindre qui est une des façons qui pour nous matérialise le mieux la figure de la droite à l’infini. Cette droite à l’infini, chacun sait son rapport à ce que j’appelle simplement le rond de la consistance. Chacun sait ce rapport, et pas seulement de m’avoir vu le figurer dans le nœud borroméen, celui qui porte l’indication n. bo.

Un nommé Desargues, l’Arguésien, comme on dit, s’est avisé depuis longtemps que la droite infinie est en tout homologue au cercle. En quoi il a devancé le nommé Riemann, il l’a devancé. Néanmoins, une question reste ouverte à quoi je donne, par l’attention que j’apporte au nœud borroméen, déjà réponse. Ce qui ne vous empêchera pas, du moins je l’espère, d’en maintenir présente pour votre esprit la forme question.

[Au tableau] Comme vous le voyez dans cette figure à gauche [figure XI1], du nœud borroméen constitué par l’équivalent de ce cercle sous la forme d’une droite nouée à un cercle, du couple [figure XI-4] supposé de ce qui là pour le supporter pour votre esprit, pourrait être du Symbolique. Les deux autres, sans qu’on sache de quelle droite figurer spécialement le Réel, par exemple celle-ci, ou l’Imaginaire pour celle-ci, que faut-il pour que cela fasse nœud ? Il faut que le point à l’infini soit tel que les deux droites ne fassent pas chaîne. C’est là la condition que les deux droites quelles qu’elles soient, « d’où qu’on les voit » – je vous fais remarquer en passant que ce d’où qu’on les voit supporte cette réalité que j’énonce du regard, – le regard n’est définissable que d’un « d’où qu’on les voit » – d’où qu’on les voit est à vrai dire, si nous pensons une droite comme faisant rond d’un point, d’un point unique à l’infini, comment ne pas voir que ceci à un sens qu’elle ne se noue pas. Non seulement que ceci à un sens qu’elle ne se noue pas, mais que c’est deux nœuds passent noués, qu’elles se noueront effectivement à l’infini, point qu’à ma connaissance, Desargues, Desargues dont j’ai usé au temps où ailleurs qu’ici, à Normale Supérieure, pour l’évoquer par son nom, je faisais mon séminaire sur Les Ménines, Les Ménines de Vélasquez où j’en profitais pour me targuer de situer où il était ce fameux regard dont bien évidemment c’est le sujet du tableau, je le situais quelque part, dans le même intervalle – peut-être qu’un jour vous verrez paraître ce séminaire, – dans le même intervalle que j’établis ici au tableau, sous une autre forme, à savoir dans celui que je définis de ce que les droites infinies en leur point supposé d’infini, ne se nouent pas en chaîne.

C’est bien là que commence pour nous la question. Il ne semble pas que Desargues ne se soit jamais posé la forme sous laquelle il supposait ces droites infinies, en posant la question de savoir si elles se nouaient ou pas. Il est tout à fait frappant que Riemann, pour lui, ait tranché la question d’une façon peu satisfaisante en faisant de tous les points à l’infini à quelque droite qu’ils appartiennent un seul et unique point qui est au principe de la géométrie de Riemann.

A soulever la question du nœud, nous allons voir, je vais ici vous figurer quelque chose [figure XI-8], ah! dont j’espère venir à bout, sous la -forme d’un nœud, d’un vrai, qui, chose curieuse, présente une sorte d’analogie avec cette forme [figure XI-3]. Si nous étudions ce nœud comme le font les mathématiciens, ce que nous, tout ce que nous pouvons faire, c’est d’amorcer la notion dite du groupe fondamentale, c’est-à-dire de définir la structure de ce nœud par une série de trajets qui se feront d’un point quelconque, celui-ci, par exemple. Nous définissons le nœud par quelque chose qui s’appelle le groupe fondamental, et qui comporte un nombre qui diffère selon les nœuds, un nombre de trajets qui seront nécessaires pour indiquer sa structure. Ces trajets, même s’ils font plusieurs boucles dans chacun, mais là je pose la question, je mets le trou entre guillemets, dans chacun des trous qui, apparemment, font ce nœud. Il y en aura un certain nombre, et contrairement à ce que vous pouvez imaginer, ce nombre, dans ce cas, dans ce cas où la figure mise à plat à l’air d’en comporter quatre, quatre champs distincts, ça ne fera pas pour autant quatre cercles individualisables de trajet, mais contrairement à ce qu’on peut imaginer, ça n’est pas le nombre qui sera caractéristique de ce groupe fondamental, ça sera la relation entre un certain nombre de trajets.

Nous supportons là, à l’état pur, la notion de rapport, en tant que, justement, elle nous ramène au nœud, au nœud borroméen puisque ce rapport même fait nœud, à ceci près que ce nœud manque de nombres. En prenant cette étape du nœud borroméen, nous supportons du nombre même les cercles ou les trajets dont il s’agit pour n’importe quel nœud, même si ce nœud, celui que je viens de dessiner, vous le voyez, n’a de consistance qu’unique. Nous prenons le nombre comme truchement, comme intermédiaire, comme élément lui-même pour nous introduire dans la dialectique du nœud. Ce où cette fois-ci j’en viendrai est ceci, c’est à savoir que rien n’est moins, si je puis dire, naturel que de penser ce nœud. Qu’il y ait de l’un, ce que j’ai avancé en son temps pour le supporter du cercle est quelque chose à quoi, justement, se limite le mouvement de la pensée, à faire cercle, et c’est en quoi il n’y a rien de plus naturel, c’est le cas de le dire, que de lui reprocher son cercle comme vicieux. Que si, pour figurer le rapport des sexes sans autrement ni plus préciser, je trouve la figure de deux un, sous la forme de deux cercles, qu’un troisième noue précisément de ce qu’ils ne soient entre eux pas noués, car ce n’est pas seulement de ce qu’ils ne soient, qu’ils soient libres quand ce troisième est rompu, qu’il s’agit, c’est de ce que ce troisième comme je vous l’ai montré dans la figure [figure XI-9], celle-ci, c’est de ce que ce troisième les noue expressément de ce qu’ils ne soient pas noués qu’il s’agit, et n’aurai-je fait que de faire passer cette fonction dans votre esprit, que je considérerai qu’aujourd’hui je n’ai pas parlé en vain. C’est de cela même qu’il s’agit, c’est de ce qu’ils ne soient pas noués qu’ils se nouent. Et la nécessité qu’un quatrième terme vienne ici imposer ses vérités premières est justement ce sur quoi je veux terminer. C’est à savoir que sans le quatrième, rien n’est à proprement parler mis en évidence, je n’ai pu aujourd’hui le faire, mis en évidence de ce qu’est vraiment le nœud borroméen.

Dans toute chaîne, pour vous imaginer la plus simple, dans toute chaîne borroméenne, il y a un puis un deux [figure XI-10] Selon la forme que je vous ai dessinée tout à l’heure, vous trouverez là le un et le deux, qui est le commencement de la chaîne après quoi, ici, il y aura un troisième cercle qui fera boucle. Qu’est-ce qu’implique que dans une chaîne quelconque, comme elle fait chaîne, elle fait toujours chaîne, nous placions un quelconque des deux premiers au rang troisième ? Quelle que soit la chaîne, l’opération dont il s’agit impliquera pour nous limiter à la chaîne 1-2-3-4, [figure XI-11] impliquera que si nous voulons mettre un quelconque de ces deux au rang troisième, le 1 sera dès lors noué au 2, et par le 3 et par le 4. Faites-en l’expérience, car aussi bien, il n’y a rien de tel pour essayer de penser ce nœud que de manipuler des ronds de ficelles.

Je le répète, quoique ayant déjà plus de place au tableau : 1-2-3-4, [figure XI-12] à nous limiter à ceci, dans une chaîne quelconque, par quelque bout que nous la prenions, impliquera qu’à mettre soit le 1, soit le 2, à la place dite troisième, à en faire l’effort, nous obtiendrons ceci, c’est que pour choisir l’un des deux, puisque ici c’est le 2 que nous choisissons, pour mettre le 2 là en rang troisième, le 3 et le 4 nécessairement noueront ce 1 au 2 ainsi déplacé. II est tout à fait clair que le 1 et le 2 sont interchangeables, c’est à savoir qu’au début d’une chaîne, le premier et le second sont indéfiniment interchangeables. [figure XI-13]. C’est à placer l’un de ces deux-là au rang trois, à nous efforcer à viser à le placer au rang trois que nous verrons non pas seulement le trois intéressé et passer à la place du 2, mais avec le 3, le quatrième. Et c’est en cela que se justifie l’intérêt que je porte au nœud à quatre dans l’occasion et que je développerai l’année prochaine.

Dès lors, puisque nous ne savons pas à quoi coupler la nomination, la nomination qui ici fait quatrième terme, est-ce que nous allons le coupler à l’Imaginaire, a savoir que venant du Symbolique, la nomination est là pour faire dans l’Imaginaire un certain effet ? C’est bien en effet ce dont il semble s’agir chez les logiciens quand ils parlent du référent. Les descriptions russelliennes, celles qui s’interrogent sur l’auteur, celles qui se demandent en quoi il est légitime et fragile logiquement d’interroger sur le fait que Walter Scott est-il ou non l’auteur de Waverley, il semble que cette référence concerne expressément ce qui s’individualise du support pensé des corps. Il n’est en fait certainement rien de semblable. La notion de référent vise le Réel. C’est cri tant que Réel que ce que les logiciens imaginent comme Réel donne son support au référent. A cette nomination imaginaire, celle qui s’écrit de ceci par exemple, que de la relation entre R et S, nous avons une nomination indice i, et puis le I pour nous en tenir au nOeud à quatre, comme constituant le lien entre le Réel et le Symbolique.

Je proposerai ceci, c’est que la nomination imaginaire, c’est très précisément ce que je viens de supporter aujourd’hui par la droite infinie, et que cette droite, dans ce cercle que nous composons d’un cercle et d’une droite, que cette droite est très précisément non pas ce qui nomme quoique ce soit de l’Imaginaire mais ce qui, justement, fait barre, inhibe le maniement de tout ce qui est démonstratif, de tout ce qui articulé comme Symbolique, fait barre au niveau de l’Imagination même et rend ce dont il s’agit dans le corps dont chacun sait que ce qui intéresse le corps, au moins dans la perspective analytique, c’est le corps en tant qu’il fait orifice, que ce par quoi il se noue à quelque Symbolique ou Réel dont il s’agisse, c’est justement de ce nœud, la mise en évidence d’un cercle, d’un orifice que l’Imaginaire est constitué.

Cette droite infinie qui ici complète le faux trou [figure XI-15] dont il s’agit, puisqu’il ne suffit pas d’un orifice pour faire un trou, chacun d’entre eux, étant indépendant des autres, c’est très précisément l’inhibition que la pensée a à l’endroit du nœud. Nous pouvons interroger de la même façon, si entre Réel et Imaginaire, c’est la nomination indice du Symbolique, c’est-à-dire en tant que dans le Symbolique surgit quelque chose qui nomme, nous voyons ça dans les débuts de la Bible, à ceci près qu’on ne remarque pas ceci, c’est que l’idée créationniste, le Fiat lux inaugural, n’est pas une nomination. Que ce soit du Symbolique que surgisse le Réel, c’est ça l’idée de création, n’a rien à faire avec le fait que dans un second temps, le même Dieu donne leur nom à chacun des animaux qui habitent le paradis.

De quelle nomination s’agit-il, dans ce que j’appelle ici pour l’indiquer d’un grand Ns, de quelle nomination s’agit-il ?

Dans cette; dans une des deux de ce qui nous est mythiquement raconté ? C’est bien en effet une question à quoi il vaut qu’on s’arrête un peu, parce que cela relève de sens qui, dans chaque cas, est un sens différent. La nomination de chacun qui d’ailleurs est un nom commun, non pas au sens de Russell un nom propre, la nomination de chacun des espèces que représente-t-elle? Une nomination, assurément, étroitement symbolique, une nomination limitée au Symbolique. Est-ce que c’est cela qui nous suffit pour supporter ce qui vient en un point certes pas indifférent dans cette élémentation à quatre du nœud qui se supporte du Nom-du-Père. Est-ce que le Père c’est celui qui à donné leur nom aux choses ? Ou bien ce Père doit-il être interrogé en tant que Père, au niveau du Réel? Est-ce que pour tout dire, le Père éternel, à quoi bien sûr, rien ne nous empêcherait de croire s’il était même pensable que lui-même croit en lui, alors que c’est tout à fait clairement impensable, est-ce que nous devons mettre le terme nomination comme noué au niveau de ce cercle dont nous supportons la fonction du Réel ? C’est entre ces trois termes, nomination de l’Imaginaire comme inhibition, nomination du Réel comme ce qu’il se trouve qu’elle se passe en fait, c’est-à-dire angoisse, ou nomination du Symbolique, je veux dire impliquée, fleur du Symbolique lui-même, à savoir comme il se passe en fait sous la forme du Symptôme, c’est entre ces trois termes que j’essaierai l’année prochaine, ce n’est pas une raison parce que j’ai la réponse pour que je ne vous la laisse pas en tant que question, que je m’interrogerai l’année prochaine sur ce qu’il convient de donner comme substance au « nom de père ».

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